CSARS Rapport annuel 2012–2013 : Combler les lacunes

Combler les lacunes

CSARS Rapport annuel 2012–2013 : Combler les lacunes

Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité
B.P. 2430, succursale D
Ottawa (Ontario) K1P 5W5

© Travaux publics et Services gouvernementaux Canada 2013
Numéro de catalogue PS 105-2013
ISSN 19210566

 


 

Le 30 septembre 2013

L'honorable Steven Blaney
Ministre de la Sécurité publique
Chambre des communes
Ottawa (Ontario)
K1A 0A6

Monsieur le Ministre,

C'est pour nous un plaisir de vous remettre le rapport annuel du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité pour l'exercice 2012-2013, tel qu'il est prescrit à l'article 53 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, afin qu'il soit transmis au Parlement.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de notre haute considération.

Chuck Strahl, C.P. Président

Chuck Strahl, C.P.
Président

Frances Lankin, C.P., C.M.

Frances Lankin, C.P., C.M.

Denis Losier, C.P., C.M.

Denis Losier, C.P., C.M.

Deborah Grey, C.P., C.M.

Deborah Grey, C.P., O.C.

L. Yves Fortier, C.P., C.M., O.Q., c.r.

L. Yves Fortier, C.P., C.C., O.Q., c.r.

À propos du CSARS

Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS ou Comité) est un organisme indépendant qui rend compte des opérations du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS ou Service) au Parlement du Canada. Le CSARS effectue des études sur les activités du SCRS et enquête sur les plaintes du public contre le Service. Cela lui permet de fournir au Parlement, et à tous les citoyens du Canada, l'assurance que le Service enquête sur les menaces à la sécurité nationale et fait rapport à ce sujet d'une façon qui respecte la primauté du droit et les droits des Canadiens.

Pour plus de renseignements sur le CSARS, veuillez consulter le site www.sirc-csars.gc.ca.

À propos du SCRS

Le SCRS a la responsabilité d'enquêter sur les menaces contre le Canada, d'analyser l'information et de produire des renseignements.

Pour protéger le Canada et ses citoyens, le SCRS conseille le gouvernement fédéral au sujet des questions et activités qui menacent ou peuvent menacer la sécurité nationale, notamment le terrorisme, la prolifération des armes de destruction massive, l'espionnage et les activités d'instigation étrangère.

Le SCRS fournit également des évaluations de sécurité individuelles pour le compte de tous les ministères
et organismes fédéraux, sauf la Gendarmerie royale du Canada.

Cadre juridique du CSARS et du SCRS

Suite à l'adoption de la Loi sur le SCRS, le Canada est devenu l'un des premiers pays démocratiques du monde à doter son service de sécurité d'un cadre juridique. Cette Loi a clairement défini le mandat et les limites du pouvoir de l'État en matière de renseignement de sécurité. Par ailleurs, elle a créé des mécanismes de reddition de comptes qui permettent de contrôler ce pouvoir considérable.

Table des matières

Message des membres du comité

Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS) a été créé pour s’assurer que les activités liées au renseignement de sécurité au Canada sont menées de façon efficace et appropriée, dans le respect de la loi, et qu’il existe des mécanismes de reddition des comptes suffisants. Au cours de l’année dernière, le Comité a entamé un renouvellement et un remaniement des processus, et ce, pour réaliser ses objectifs clés. Tout au long de ce processus qu’il a encouragé, le Comité est resté fidèle aux devoirs et fonctions du CSARS qui, depuis 1984, joue le rôle de contrepoids essentiel aux pouvoirs extraordinaires dont le Parlement a investi le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS). Notre travail, dont les grandes lignes se trouvent dans le rapport annuel présenté au Parlement et, par son entremise, à la population du Canada, démontre notre engagement à fournir aux Canadiens autant de détails que la loi nous permet d’en divulguer.

Les pouvoirs du CSARS découlent de la même loi qui a créé le SCRS et lui a donné son rôle et ses pouvoirs : le SCRS a pour mandat d’enquêter sur les menaces à la sécurité, telles que définies dans la Loi sur le SCRS; tandis que le CSARS a pour mandat d’aider à assurer que le Service respecte les droits fondamentaux et les libertés des Canadiens dans l’exercice de ses activités. En tant qu’organisme indépendant qui relève du Parlement, le CSARS s’est engagé à mener ses activités et les conclusions de son travail dans la plus grande transparence possible, tout en s’assurant de respecter les normes les plus strictes en matière d’informations concernant la sécurité nationale. Ces engagements illustrent les valeurs fondamentales du Comité depuis près de 30 ans.

Naturellement, le CSARS évolue, et l’année a été jalonnée d’événements importants : de nouveaux membres se sont joints à notre Comité, qui a produit ses premiers travaux sous la nouvelle présidence de l’honorable Chuck Strahl; notre mandat a été élargi, notamment pour inclure la remise du certificat du CSARS au rapport annuel du directeur du SCRS présenté au ministre de la Sécurité publique; nous avons engagé un nouveau directeur exécutif, premier changement à la direction en 14 ans; et nous nous sommes attelés au défi de réintégrer le CSARS au sein de la grande communauté du renseignement et de la sécurité au Canada.

Nous avons ici le plaisir de présenter neuf résumés des études approfondies effectuées par notre Comité au cours du dernier exercice, ainsi que les résumés des dossiers de plaintes qui ont été réglés dans cette même période.

Dans un tel rapport, il est important de prendre un moment pour reconnaître les personnes qui nous ont aidés à arriver là où nous en sommes aujourd’hui, ainsi que celles et ceux qui nous guideront à l’avenir. Tout d’abord, le Comité voudrait profiter de l’occasion pour exprimer sa plus profonde gratitude envers Susan Pollak, ancienne directrice exécutive du CSARS. Comme le savent tous les membres de la communauté du renseignement et de la sécurité, c’est un euphémisme que d’affirmer que, pendant ses 14 années de leadership, le nom de Mme Pollak et celui du CSARS étaient devenus interchangeables. Mme Pollak a dirigé le Comité et son personnel dans une période qui a connu cinq présidents, quatre directeurs du SCRS, la vague tumultueuse de changements après le 11 septembre, deux éditions de la conférence internationale des organismes de surveillance du renseignement en tant qu’hôte, et plus de 100 études et cas de plaintes. Nous souhaitons à Mme Pollak une retraite agréable et sereine, et nous la remercions infiniment pour ses années de loyaux services.

Par ailleurs, le Comité voudrait profiter de l’occasion pour remercier Richard Fadden, ancien directeur du SCRS, pour ses années de collaboration et sa cordialité. Au cours des quatre dernières années, M. Fadden a consacré du temps au CSARS, et a eu une attitude ouverte envers le Comité. Nous garderons de bons souvenirs de notre relation professionnelle avec lui. Nous souhaitons à M. Fadden du succès dans son nouveau poste, et nous nous réjouissons de travailler avec son successeur.

Nous nous tournons maintenant vers l’avenir pour souhaiter la bienvenue au nouveau directeur exécutif du CSARS, Michael Doucet. M. Doucet a travaillé au Centre de la sécurité des télécommunications Canada, au Service correctionnel du Canada, et à la GRC, où il a occupé le poste de dirigeant principal de l’information. Le Comité et son personnel ont d’ores et déjà été impressionnés par l’enthousiasme et le leadership de M. Doucet, et nous attendons avec intérêt de l’innovation et des progrès sous sa direction au cours des prochaines années.

Le CSARS a aussi récemment accueilli Deborah Grey, C.P., O.C., au rang de membre du Comité. Mme Grey dispose d’une vaste expérience dans la promotion et la défense de l’intérêt public à l’échelle nationale. En outre, le Comité vient d’accueillir L. Yves Fortier, C.P., C.C., O.Q., c.r., en tant que nouveau membre. M. Fortier, qui possède une longue expérience en tant qu’arbitre international, avocat plaideur, diplomate et directeur de nombreuses sociétés canadiennes, apporte toute une gamme de précieuses compétences au Comité. Il va sans dire que le président est heureux et enthousiaste à l’idée de s’appuyer sur les connaissances et le talent de Mme Grey et de M. Fortier au cours des années à venir.

Comme nous l’avions prédit dans le rapport annuel 2011-2012, cette année, le Comité a consacré une partie de son temps et de son énergie à s’attaquer à son nouveau défi : guider le CSARS dans l’évolution de ses responsabilités et de son mandat, notamment la tâche de remise du certificat au rapport annuel du directeur du SCRS présenté au ministre. Le CSARS s’est avéré parfaitement en mesure de répondre à cette exigence législative. Une relation symbiotique a déjà commencé à s’établir entre la fonction d’examen du Comité et le processus de remise du certificat, où ces deux tâches se nourrissent mutuellement. C’est finalement l’expertise solidement établie du Comité en matière d’élaboration d’études qui a facilité cette transition.

La cohérence de l’approche entre le travail d’étude bien ancré du CSARS et le processus de remise de certificat a également posé la question de savoir comment préserver l’indépendance au cœur du mandat initial du CSARS tout en répondant aux nouvelles exigences législatives. Comme la méthodologie utilisée dans le processus de remise du certificat est assez semblable à l’approche requise pour que le Comité s’acquitte de ses autres responsabilités législatives, il n’y a pas de conflit intrinsèque entre la responsabilité du CSARS de faire rapport au Parlement et celle de remettre un certificat au ministre. En effet, les questions soulevées lors de la remise du certificat au rapport du directeur 2011-2012 ont été abordées dans les récentes études du CSARS, et décrites dans son rapport annuel 2011-2012 présenté au Parlement.

À mesure que l’avenir se profile, nous reconnaissons également la nécessité de redynamiser la promotion du CSARS et de son personnel dans le cadre de l’environnement plus large de la sécurité et du renseignement. Au Canada, cela se traduira par l’établissement de liens plus forts avec d’autres organisations d’examen et de surveillance, et une consultation accrue avec les experts appropriés en matière de renseignement et de sécurité. Sur le plan international, cela signifiera faire le suivi des liens importants créés lors d’événements comme la conférence internationale des organismes de surveillance du renseignement.

Enfin, le CSARS demeure résolu à promouvoir et à enrichir le débat critique au Canada sur les objectifs et les limites du renseignement de sécurité, et les devoirs et fonctions du SCRS en la matière. Comme cela sera reflété dans ce rapport, que nous présentons avec fierté, nous encourageons le SCRS à réaligner et réviser toute une gamme de politiques et d’approches pour soutenir efficacement ses activités d’enquête clés, favorisant ainsi la sécurité et la sûreté continue de la population canadienne, tout en préservant les droits et libertés dont bénéficie le peuple.

Membres du comité

L'honorable Chuck Strahl

L’honorable
Chuck Strahl

L'honorable Frances Lankin

L’honorable
Frances Lankin

L'honorable Denis Losier

L’honorable
Denis Losier

L'honorable Deborah Grey

L’honorable
Deborah Grey

L'honorable L. Yves Fortier

L’honorable
L. Yves Fortier

Message du directeur exécutif

Quand l’honorable Chuck Strahl m’a nommé directeur exécutif du CSARS en décembre 2012, j’ai été frappé de voir à quel point ce Comité, composé de membres du Conseil privé, était peu connu du public. Cela fait bientôt un an que j’occupe mon nouveau rôle, et je pense que je suis désormais bien placé pour faire la lumière sur le travail et les méthodes du CSARS, et expliquer ce que les membres du parlement et la population canadienne peuvent attendre de nous à l’avenir.

Le Comité se compose de Canadiens d’exception, qui puisent dans leurs expériences personnelle et professionnelle pour évaluer l’information qui leur est présentée sur les activités du SCRS. Les membres, qui sont généralement nommés au Comité pour cinq ans, travaillent à temps partiel tout au long de leur mandat. En tant que membres du Conseil privé, ils sont informés des activités du SCRS et conseillés par une équipe dévouée d’experts de la sécurité nationale qui travaille à temps plein, ou par l’entremise des audiences de plaintes.

Le président du Comité délègue au directeur exécutif la responsabilité du fonctionnement quotidien du CSARS. En d’autres termes, il m’incombe de trouver les bonnes personnes et de mettre en œuvre les processus et procédures pour m’assurer que le Comité est bien informé. Je suis en outre chargé de veiller à la bonne gestion financière des fonds publics accordés au CSARS.

Permettez-moi de souligner les grands principes, qui, je crois, sont au cœur du travail que mon équipe et moi-même accomplissons au nom du Comité et, par son entremise, pour les parlementaires, et donc toute la population canadienne.

Le plus important principe est notre indépendance. Les architectes de la Loi sur le SCRS ont compris que le CSARS devait être un organisme externe au pouvoir exécutif du gouvernement, et ce, pour veiller à ce que nos conclusions et recommandations ne soient jamais influencées par des considérations bureaucratiques ou politiques. La Loi sur le SCRS répond à cette exigence de deux façons complémentaires. Premièrement, les employés du CSARS ne sont pas membres de l’administration publique centrale : le Comité constitue un employeur distinct. Les employés du CSARS conservent leur poste à la discrétion du Comité, ce qui signifie qu’ils ont des obligations à son égard, et non, dans la plupart des cas, envers les institutions gouvernementales. Deuxièmement, les membres du Comité sont nommés comme membres du Conseil privé par le premier ministre du Canada, après consultation avec les autres partis politiques, et ne peuvent être des députés en exercice au Parlement. Cela signifie que, même si les membres ont des profils politiques divers et viennent de toutes les régions du pays, ils siègent au Comité en position de confiance, et que les prédispositions partisanes ne sont pas les bienvenues.

Je suis bien conscient que l’un des risques que comporte ce principe d’indépendance est de se laisser indûment influencer par la culture du secret, ou de se laisser piéger par le « cercle magique » décrit par le romancier John le Carré. Le CSARS doit donc toujours concilier le besoin de transparence concernant les activités du SCRS à l’exigence de protéger les renseignements sur la sécurité nationale. Et je vais être très clair là-dessus : nous ne mettrons jamais en péril la sécurité des Canadiens en communiquant des renseignements qui ne serviraient qu’à embellir l’image du Comité et à le présenter comme une entité pertinente et d’actualité. Même si je suis convaincu que nous sommes toujours à l’écoute de ce qui se passe au SCRS, nous devons faire preuve de la plus grande sagesse avec les informations qui nous sont confiées.

Cela dit, afin de rester indépendant du SCRS, le bureau principal du CSARS est situé au centre-ville d’Ottawa. Il s’agit là également d’un « terrain neutre » pour le processus quasi judiciaire d’enquête sur les plaintes, dans le cadre duquel les représentants du SCRS viennent au CSARS pour présenter leur cas. Le CSARS dispose aussi d’un espace de travail au siège du SCRS : c’est là que le personnel du Comité accède aux informations ministérielles et opérationnelles du Service (sur papier et en version électronique), des données qui traitent aussi bien des services de santé que des renseignements bruts sur des opérations très secrètes. Des réunions avec les employés et les gestionnaires du SCRS sont organisées au besoin, et le Comité peut se déplacer dans les bureaux régionaux et les postes à l’étranger du Service. Bref, nous pouvons accéder à tout ce dont nous avons besoin, où que cela se trouve. L’année prochaine, pour la première fois, je me rendrai dans un poste à l’étranger dont l’emplacement est secret. J’irai autant pour l’information que je vais obtenir que pour appuyer le message que ce déplacement souligne : la portée du Comité ne peut être entravée.

Compte tenu de notre accès complet à l’information en matière de sécurité nationale, je reconnais que la confiance accordée à notre travail est ancrée dans la compétence des personnes chargées des activités juridiques et du travail de recherche au nom du Comité.

Cela m’amène à mon deuxième principe : le maintien d’effectifs extrêmement compétents et professionnels. Comme on peut s’y attendre, mes employés sont bien formés (à titre d’exemple, les analystes détiennent au moins deux diplômes d’études postsecondaires). Mon équipe se compose de personnes de différents horizons en termes de formation universitaire et d’expérience professionnelle, et de nombreux employés ont près de dix ans d’expérience ou plus dans la gestion de questions délicates de sécurité nationale. J’ai fait carrière dans les mondes du renseignement et du maintien de l’ordre, et j’ai eu le plaisir de collaborer avec tout un éventail de professionnels canadiens et étrangers dans ces domaines au cours des 25 dernières années. Je peux donc affirmer que je suis impressionné par les évaluations d’experts de l’équipe du CSARS. Des copies de nos rapports classifiés sont transmises au SCRS et au ministre de la Sécurité publique et, par le passé, environ 70 pour cent de nos recommandations ont été acceptées par le Service, même s’il s’agit là de recommandations non exécutoires.

Le troisième principe est complémentaire à la capacité du personnel du CSARS : il s’agit pour le Comité de jouer son rôle de membre productif et informé au sein la communauté de la sécurité nationale. Même si je suis satisfait du travail accompli par mon petit groupe d’experts, je suis tout aussi déterminé à les faire progresser sur le plan professionnel. Ainsi, j’ai entrepris un programme de modernisation qui, grâce à des systèmes technologiques et analytiques supplémentaires, offrira aux employés de nouvelles ressources pour gérer leurs processus juridique et de recherche.

Je suis également bien conscient qu’améliorer sans cesse les compétences professionnelles de mes employés passe aussi par les initiatives de relations externes du CSARS. Lorsque c’est possible, nous encourageons les employés à établir un lien avec des professionnels issus des milieux universitaire, juridique, du renseignement, de la vérification et policiers. De telles mesures de liaison visent à s’assurer que le personnel du CSARS reste bien informé des questions liées à leur domaine professionnel. Ces échanges permettent également au personnel de tirer parti d’un nombre important et croissant d’experts que nous avons le privilège de consulter au Canada. Enfin, la stratégie essaie également de remédier au risque du phénomène de « pensée de groupe » en s’assurant que les employés peuvent replacer les activités du SCRS dans un contexte plus large que celui dans lequel ils travaillent.

En me concentrant sur l’avenir, je garde à l’esprit que l’accès sans entrave du CSARS à l’information du SCRS est notre raison d’être, et que nous pouvons désormais aller encore plus loin avec l’adoption de certai­nes nouvelles tâches auparavant dévolues à l’ancien Bureau de l’inspecteur général du SCRS. En effet, le Comité est désormais tenu de remettre un certificat au rapport annuel du directeur du SCRS présenté au ministre de la Sécurité publique, indiquant dans quelle mesure il lui paraît acceptable.

Pour nous assurer que l’équipe du Comité peut parfaire sa compréhension professionnelle du SCRS du mieux possible, nos objectifs à court et à moyen terme consistent à intégrer davantage nos trois piliers fondamentaux en termes d’information : les plaintes, les études et la remise du certificat.

Plus généralement, le CSARS continue de jouer un rôle important aux côtés de la communauté du renseignement du Canada, et ce, en contribuant aux débats secret et public sur la sécurité nationale. J’envisage d’élargir notre contribution dans ces deux domaines au cours de mon mandat en tant que directeur exécutif du CSARS. Cela prendra du temps, et cela dépendra également de l’élargissement éventuel de la portée légale du CSARS, pour que le Comité puisse suivre le fil d’information sur la sécurité liée au SCRS jusque dans d’autres ministères et organismes fédéraux. Cependant, même si la loi ne change pas, je reste convaincu que nos efforts visant à faire évoluer notre travail seront bien reçus par le SCRS et par le Parlement, qui les verront comme un projet constructif.

Dans nos rapport annuels et rapports ministériels sur le rendement ultérieurs, je continuerai à fournir davantage de contexte en termes de progrès réalisés pour faire progresser notre expertise, et ce, afin d’appuyer notre mandat.

Permettez-moi d’affirmer sans équivoque que notre indépendance et notre professionnalisme ne seront jamais mis en péril. Nous sommes déterminés à réaliser notre devoir au nom du Comité, et ce, afin que le Parlement et la population canadienne restent confiants dans l’idée que les services d’espionnage et de renseignement humain du Canada sont pleinement responsables dans l’exercice de leurs fonctions.

Avec toute ma considération,

Michael Doucet

Michael Doucet

À propos de ce rapport

Le mandat et les fonctions du CSARS sont définis dans la loi même qui établit le cadre juridique du Service, soit la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. Conformément à cette loi, le CSARS prépare chaque année un rapport annuel sur ses activités que le ministre de la Sécurité publique transmet au Parlement.

Le présent rapport annuel résume les principales analyses du CSARS, ainsi que les constatations et recommandations qui découlent de ses études et de ses enquêtes sur les plaintes. Il compte trois sections :

Section 1 : Bilan de l'exercice

Analyse d'importants faits nouveaux dans le domaine du renseignement de sécurité, et de leurs rapports avec certaines constatations et recommandations formulées par le CSARS pendant l'exercice précédent.

Section 2 : Résumés des études du CSARS et des plaintes

Résumés des études effectuées par le CSARS et des décisions qu'il a rendues au sujet de plaintes durant la période visée par ce rapport.

Section 3 : Survol du CSARS

Exposé des activités du CSARS en matière d'intéressement du public et de liaison et sur le plan administratif. Comprend des détails sur son budget annuel et ses dépenses.

Renseignements généraux utiles et faciles à trouver

Reportez-vous aux encadrés tout au long du présent rapport annuel. Vous y trouverez de précieux renseignements généraux sur diverses questions juridiques et stratégiques ayant trait aux fonctions de surveillance et d'enquête du CSARS.

Section 1 : Bilan de l'exercice

Dans son rapport annuel 2009-2010, le CSARS notait que « les périodes de changements profonds mènent souvent à de graves lacunes en matière de politiques ». Le Comité avait alors demandé au SCRS et au Parlement d’élaborer une série de questions sur les objectifs et les limites des opérations du Service et de la collecte de renseignements sur la nouvelle grande scène internationale. Dans les années qui suivirent, le Service et le Parlement se sont employés à définir un cadre dans lequel ces objectifs et limites ont été exprimés de façon plus précise, et ce, grâce à la révision des priorités en matière de renseignement, à des lignes directrices plus substantielles sur le partage de l’information, et à des mécanismes pour promouvoir des partenariats canadiens plus efficaces.

Des progrès considérables ont été accomplis pour mieux formuler les priorités et objectifs actuels du SCRS en matière de renseignement. Il est désormais temps de renforcer les règlements et les meilleures pratiques pour s’assurer d’atteindre ces objectifs, et ce, par l’entremise d’un éventail de mesures appropriées, justifiées et efficaces. Après avoir établi une présence bien plus encadrée et marquée à l’étranger en s’appuyant sur des partenariats canadiens beaucoup plus approfondis et productifs, et après avoir réorganisé ses priorités nationales afin de favoriser de meilleures sources de collecte de renseignements, le SCRS doit revoir plusieurs de ses programmes afin d’identifier leurs objectifs, et de les faire coïncider avec de nouveaux règlements et de nouvelles politiques et procédures opérationnelles.

De même, un changement dans la capacité du CSARS à évaluer pleinement le travail du Service doit venir compléter ces évolutions. En effet, depuis son rapport annuel 2010-2011, le CSARS expose les limites actuelles auquel il se heurte dans l’exercice de son examen, réduit au fonds de renseignements et au personnel du SCRS, et qui est de plus en plus en décalage avec le modus operandi du renseignement moderne. Une plus grande coopération avec des partenaires canadiens et des systèmes de partage de l’information plus exhaustifs signifient que les enquêtes du SCRS évoluent au sein d’un réseau de plus en plus étendu. Ce thème se retrouve cette année dans la plupart des études, et il apparaît clairement quand il s’agit de collaboration avec la Gendarmerie royale du Canada, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI), le ministère de la Défense nationale, l’Agence des services frontaliers du Canada et, en particulier, le Centre de la sécurité des télécommunications Canada (CSTC). En outre, tous les ministères et toutes les agences du gouvernement, et à plus forte raison les proches alliés du Canada, ont de plus en plus recours à la technologie. Les gouvernements des pays occidentaux ont réagi et se sont adaptés, en intégrant davantage des organisations de renseignement qui étaient autrefois bien distinctes. Les barrières technologiques cloisonnant les systèmes d’information et les bases de données continuent à tomber, et le partage des données, désormais possible, est devenu monnaie courante. Dans ce rapport annuel, nous examinons les avantages et les risques inhérents à ce changement, et nous mettons en évidence les défis croissants liés à l’examen complet et efficace des activités.

Le SCRS s’apprête à tirer profit de cette nouvelle capacité, mais le CSARS doit aussi être en mesure de réagir. Le Comité doit montrer suffisamment de souplesse pour suivre et examiner efficacement les activités et enquêtes du SCRS, même lorsque celles-ci s’étendent à d’autres agences et ministères. Compte tenu de l’inévitabilité de l’interconnexion technologique, le CSARS doit avoir en main les outils législatifs et des engagements du gouvernement en matière de ressources pour s’assurer que son rôle de frein et de contrepoids demeure pertinent et efficace.

Études du CSARS

Cette année, l’intérêt que le Comité manifeste depuis longtemps envers le renforcement de la collaboration entre le SCRS et le Centre de la sécurité des télécommunications Canada (CSTC) nous a conduits à rédiger l’une de nos plus grandes études. Ce partenariat en matière de renseignement devrait être l’un des plus importants des dix prochaines années, et l’étude du CSARS a mis en évidence les grands gains d’efficience potentiels d’une plus grande coopération en matière de partage des services ou des renseignements, ainsi que les domaines où les résultats étaient encore en deçà des attentes. En matière de partage des renseignements, le CSARS a trouvé des limites à l’application des procédures établies liées au renseignement de source humaine (HUMINT) aux procédures liées au renseignement d’origine électromagnétique (SIGINT). En effet, l’un des grands risques d’une collaboration accrue entre ces deux mondes est l’érosion potentielle du contrôle sur l’information partagée.

Une plus grande coopération entre les deux organismes est inévitable et souhaitable. Compte tenu de ce fait, le CSARS a identifié un besoin de renforcer de nombreux programmes individuels avec un éventail plus complet de politiques et des procédures, et ce, afin de répondre aux défis croissants qui se posent et à la nécessité de veiller à ce que les deux organismes continuent à respecter leur mandat.

Dans une autre étude sur le nouveau pouvoir octroyé au moyen de mandat en vertu de l’article 21 de la Loi sur le SCRS, le CSARS a également constaté que, compte tenu de la nécessité actuelle de tirer parti des partenariats internationaux afin de garder la trace des cibles du SCRS quand elles voyagent à l’étranger, le Service avait entrepris d’optimiser les mécanismes et partenariats existants, et ce, afin d’augmenter sa capacité de collection de renseignements. Cependant, l’augmentation du volume des renseignements résultant du partage de l’information a également entrainé une diminution du niveau de contrôle sur le flux, et potentiellement l’usage, des renseignements émanant du SCRS, une fois transmis à des partenaires. Bien que le Service ait déjà été identifié ce risque avec l’un de ses alliés, le CSARS a recommandé que le recours à des « mises en garde », c’est à dire à l’énoncée explicite de conditions et de limites concernant l’utilisation des renseignements du SCRS, soit appliqué à un plus large éventail de partenaires internationaux.

Consolider indicateurs et limites

Le CSARS et le SCRS le disent depuis plusieurs années : la lutte contre le terrorisme demeure l’une des plus grandes priorités en matière de renseignement, mais les activités de contre-espionnage sont redevenues un sujet d’actualité. Une telle menace ne s’était pas vue depuis la fin de la guerre froide, et le rôle traditionnel du SCRS, qui consistait à conseiller le gouvernement sur le risque de collecte active de renseignements par d’autres États, a évolué : de simples stratégies et activités « classiques » de contre-espionnage (p.ex. politique et militaire), on est passé à la collecte de renseignements commerciaux et financiers, à la création de réseaux d’influence et, peut-être, plus spectaculairement encore, au morcellement de téraoctets d’informations pour identifier les circonstances et l’origine d’attaques étrangères dans le domaine de la cybernétique. Le Comité a constaté que l’un des défis majeurs de la collecte et de l’analyse d’informations sur l’espionnage est, comme cela a souvent été, de faire le tri entre les activités « légitimes » d’un État menées au sein du pays et toutes les activités « clandestines ».

Compte tenu de la gamme interminable de plates-formes au sein desquelles les activités d’espionnage peuvent maintenant être menées et de techniques auxquelles on peut avoir recours, le SCRS doit relever un défi de taille : rester dans les limites « strictement nécessaires » des pouvoirs qui lui sont accordés en vertu de la Loi sur le SCRS. Par conséquent, le CSARS a recommandé que le SCRS peaufine ses politiques et pratiques existantes dans ce domaine, et ce, pour aider les enquêteurs à identifier des limites communes et cohérentes, et à élaborer des indicateurs et outils plus solides pour définir les activités qui relèvent du domaine clandestin.

Une autre étude du CSARS s’est penchée sur certaines des initiatives en cours pour soutenir les programmes de collecte de renseignements du SCRS à l’étranger. Le Service avait établi la nécessité et le mandat d’une telle collecte, et est maintenant passé à la phase d’évaluation et d’amélioration des outils et des politiques qui mettent en évidence ce rôle et établissent sa capacité à le mener. Le CSARS s’est montré satisfait de ce qu’il a estimé être un message cohérent dans toutes les directions du Service; message qui maintient que les activités de collecte de renseignements à l’étranger ont toujours un lien solide avec le Canada, et qu’on ne les laisse jamais prendre priorité sur les enquêtes menées au pays. Toutefois, avec la multiplication des défis opérationnels et juridiques pour mener de telles activités en dehors du Canada, le CSARS a identifié des lacunes sur lesquelles le SCRS doit se pencher, tant en matière d’accès à la formation (en particulier pour les personnes déployées dans des milieux dangereux) qu’en matière de limites légales des activités de collecte de renseignements. Les opérations du SCRS à l’étranger redessinent la donne, et, devant les opportunités et les risques potentiels qu’elles représentent, le SCRS va devoir élaborer un cadre juridique plus complet pour définir clairement les types d’activités acceptables et interdites.

Dans une autre étude du CSARS, l’examen annuel des postes à l’étranger, nous avons estimé que les opérations du SCRS à l’étranger ne prenaient pas tant d’ampleur, mais plutôt qu’elles évoluaient. Dans le contexte fiscal actuel de contraintes financières, le SCRS ne peut pas consacrer la même énergie à chaque source opérationnelle potentielle étrangère (et elles sont nombreuses) dont il est au courant. Le Service doit décider quelle source explorer, et dans quelle mesure. Une fois de plus, après avoir reçu des directives gouvernementales et après avoir établi des lignes directrices sur le partage d’informations avec ses alliés sûrs et avec des organismes soupçonnés de violations des droits de l’homme, le SCRS doit maintenant combler les lacunes procédurales qui se posent lorsque de telles ententes commencent à produire des renseignements. Dans certains cas, le Service a répondu aux attentes, tandis que dans d’autres, le CSARS a constaté que certains des outils spécifiques dont SCRS se sert pour prendre de décisions étaient quelque peu déficients.

Institutionnaliser la responsabilité

La nécessité d’établir une chaîne solide et cohérente de responsabilité, dernière « lacune » identifiée quand le CSARS a examiné la redistribution des priorités et des enquêtes, a été notée dans plusieurs études. L’une d’elles, qui porte sur le soutien du SCRS au périmètre de sécurité du Nord du Canada, a souligné combien la question avait évolué au cours des dernières années. En effet se pose la nécessité de trouver un équilibre entre le gouvernement qui souligne le problème de sécurité potentiel que peut poser l’Arctique, et le manque historique de collecte de renseignements dans cette région. En fin de compte, le Comité a constaté que, malgré certaines améliorations, la stratégie pour le Nord du SCRS laissait encore trop au hasard et reposait sur la mobilisation de chefs de file du Service. Sur le long terme, le SCRS, qui devrait adopter une approche centralisée plutôt qu’un leadership régionalisé, devra élaborer une stratégie ciblée, ce qui exige un plan concret, pluriannuel, et soutenu par les ressources appropriées.

D’un autre côté, le CSARS a examiné les activités du SCRS liées aux enquêtes au Canada et aux questions émergentes. Au cours des dernières années, les préoccupations nationales de longue date, comme les mouvements écologistes extrémistes, les mouvements de suprématie blanche, et l’extrémisme sécessionniste, ont, à des degrés divers, été perdues de vue. Par conséquent, le SCRS a réévalué et remanié ces enquêtes pour laisser de côté les zones qui montraient peu de signes de menace active, tout en recatégorisant les idéologies extrémistes (gauche, droite, etc.) pour se concentrer sur le potentiel de violence plutôt que sur l’orientation idéologique. Ceci a abouti à la fin du suivi et des enquêtes sur certaines cibles de longue date de moins en moins actives. Le risque résiduel demeure la possibilité d’une soudaine flambée de violence au Canada, provoquant une demande immédiate de renseignements du gouvernement. Pour atténuer ce risque, le CSARS a noté et encouragé la stratégie du SCRS qui est de maintenir une liaison active avec ses partenaires canadiens, notamment ceux du maintien de l’ordre, qui suivent ces mêmes groupes en raison de leurs activités criminelles.

Le dernier exemple d’étude de l’institutionnalisation des responsabilités a émergé de la remise du certificat du CSARS au rapport annuel du directeur du SCRS présenté au ministre de la Sécurité publique. Dans l’ensemble, le CSARS a été satisfait de la qualité et l’exhaustivité du rapport du directeur. Cependant, le Comité a constaté que le volume et le détail des informations incluses dans le rapport décrivant les opérations du SCRS à l’étranger n’étaient pas aussi exhaustifs qu’ils auraient pu l’être. Étant donné que cette section vise à fournir au ministre une solide compréhension des menaces de plus en plus grandes auxquelles les employés du Service font face lors des opérations à l’étranger, le CSARS estime que des renseignements plus détaillés fourniraient une description plus précise et plus représentative des activités du SCRS. Le CSARS a noté que le directeur du SCRS pourrait fournir plus d’informations dans ce domaine l’année prochaine, et que la question est suffisamment importante pour qu’on y prête une attention continue et que le ministre s’y intéresse.

Résoudre des plaintes

Cette année, cinq plaintes ont été réglées. Comme dans les études du CSARS, les recommandations émises dans ces affaires visent à combler des lacunes et à assurer une meilleure normalisation des pratiques du Service. Par exemple, dans le cas d’une plainte au sujet du processus d’entrevue aux fins d’immigration, le CSARS a recommandé que le SCRS adopte la pratique d’une région, qui de toujours préparer et tester les appareils d’enregistrement avant l’entrevue, et que cette pratique soit appliquée à tous les bureaux régionaux du Service. Dans une autre affaire, le CSARS a noté qu’il fallait périodiquement revoir les cas dans lesquels les employés du gouvernement pouvaient divulguer le nom de leur employeur, et les conditions dans lesquelles ils pouvaient le faire.

Boucler la boucle : L’affaire Abdelrazik

Cette année, le CSARS a terminé l’examen du rôle du SCRS dans l’affaire Abdelrazik. Dans son étude, le CSARS a conclu qu’il n’y avait aucune indication que le SCRS avait demandé aux autorités soudanaises d’arrêter ou de détenir M. Abdelrazik, mais le Comité a constaté que le SCRS avait tenu ses alliés informés des derniers renseignements concernant son cas une fois qu’il était parti du Canada. De plus, le CSARS a constaté que les deux organisations gouvernementales canadiennes les plus fortement impliquées dans cette affaire avaient mené leurs tâches consulaires et leur travail en matière de renseignement en même temps, parfois en se contredisant. Le CSARS a aussi fait part d’inquiétudes sur : la divulgation inappropriée d’informations classifiées; la production d’une évaluation exagérée de certains renseignements, transmis de façon inexacte aux partenaires du gouvernement du Canada; et l’établissement de trop nombreux rapports dans les bases d’informations de renseignements opérationnels non liés à la menace, et provenant de personnes qui n'étaient pas des cibles.

Cependant, dix ans se sont écoulés depuis la plupart des événements décrits dans le rapport, et les mesures correctives et les recommandations répondant de façon satisfaisante aux préoccupations du Comité ont déjà été couvertes dans ses rapports antérieurs, ainsi que par des commissions d’enquête. Le CSARS encourage le SCRS à profiter de cette étude pour revoir toutes les recommandations du Comité faites ces dix dernières années; toutefois, nous n’avons pas proposé de nouvelles recommandations, qui auraient été redondantes.

D’hier à aujourd’hui

Il est intéressant de noter un contraste entre les grands thèmes identifiés dans le reste des études du CSARS discutées ci-dessus. L’examen de l’affaire Abdelrazik porte sur les activités du SCRS dans la première moitié des années 2000, une époque où tout restait encore à faire dans le cadre des lignes directrices et des décisions en matière d’opérations à l’étranger. Comme le CSARS a souligné dans son étude, il n’est pas surprenant que le Comité n’ait pas fait, ici, de nouvelles recommandations, car les changements de politique du SCRS et les recommandations antérieures du Comité avaient déjà répondu aux préoccupations que le cas avait soulevées. Au début et au milieu des années 2000, le SCRS, le gouvernement et la population canadienne se demandaient encore si les activités du SCRS devaient s’étendre à l’étranger, dans quelle mesure, et les répercussions qu’un tel développement aurait sur le Service et toute la communauté canadienne du renseignement.

En 2013, le débat est passé à l’étape suivante. La discussion porte désormais sur la façon dont le travail pourrait être mieux fait, les lacunes qui subsistent dans les politiques et procédures du SCRS pour opérer dans le contexte actuel du renseignement de sécurité, et les mesures en place et appliquées pour assurer l’exercice continu des pouvoirs du Service dans les limites de son mandat.

Section 2 : Résumés des études du CSARS et des plaintes

A. Études

Les études du CSARS visent à fournir au Parlement et à la population canadienne un tableau complet des activités du Service sur le plan opérationnel. Lorsqu’il effectue ses études, le CSARS examine la manière dont le SCRS s’est acquitté de ses fonctions afin de déterminer, après le fait, si celui-ci a agi d’une manière appropriée et efficace et conforme à la loi.

Quelle différence y a-t-il entre un organisme de contrôle et un organisme de surveillance?

Un organisme de contrôle examine en permanence ce qui se passe au sein d'un service de renseignement et il a pour mandat d'en évaluer et guider ses actions courantes « en temps réel ». Le CSARS est un organisme de surveillance de sorte que, contrairement à un organisme de contrôle, il peut évaluer pleinement le rendement du SCRS sans avoir eu part à ses décisions opérationnelles et à ses activités, de quelque manière que ce soit.

Manière de conduire les études

Les études du CSARS fournissent un examen rétrospectif et une évaluation des enquêtes et activités particulières du SCRS. Son programme de recherches est conçu de manière à englober un vaste éventail de sujets, et à le faire en temps utile et par thème.

Lorsqu’il détermine les sujets qu’il compte examiner, le CSARS prend en considération :

Chaque étude fournit un instantané des actions du Service dans un cas particulier. Cette approche permet au CSARS de gérer le risque que comporte sa capacité d’examiner seulement un petit nombre d’activités du SCRS une année donnée.

Les recherchistes du CSARS consultent de nombreuses sources d’information lorsqu’ils se penchent sur des aspects particuliers des travaux du Service. Dans le cadre de ce processus, ils peuvent organiser des séances d’information avec des employés du SCRS et étudier les dossiers d’enquête sur des individus et des groupes, les dossiers de sources humaines, les évaluations de renseignements et les documents joints aux demandes de mandats.

Le CSARS peut aussi examiner les dossiers ayant trait à la coopération et aux échanges opérationnels du SCRS avec des services et des partenaires étrangers et canadiens, entre autres sources, qui peuvent différer d’une étude à l’autre. L’idée de cette multiplicité de sources est que le CSARS puisse scruter un corpus d’informations assez varié pour avoir la certitude d’examiner et de comprendre à fond les dossiers en cause.

Pour en savoir plus à propos des études antérieures du CSARS

Au fil des ans, le CSARS a étudié un vaste éventail d'activités du SCRS. La liste complète des études antérieures du Comité figure sur son site Web (www.sirc-csars.gc.ca).

Les études du Comité contiennent des constatations et, s’il y a lieu, des recommandations. Elles sont remises au directeur du SCRS et à Sécurité publique Canada.

L’importance de la reddition de comptes

Le CSARS est l’un des divers mécanismes qui visent à assurer la reddition de comptes au sujet du SCRS. Celui-ci doit aussi rendre compte de ses opérations par l’entremise du ministre de la Sécurité publique, des tribunaux, des organismes centraux du gouvernement (p. ex. le Bureau du Conseil privé et le Secrétariat du Conseil du Trésor), du vérificateur général du Canada ainsi que des commissaires à l’information et à la protection de la vie privée du Canada.

Suivi des recommandations du CSARS

Chaque année, le CSARS demande au SCRS un rapport indiquant où il en est par rapport aux recommandations formulées dans les études et les décisions prises à l'égard de plaintes pendant l'exercice précédent. Ce rapport lui permet d'assurer un suivi de la mise en œuvre de ses recommandations et d'en vérifier les effets concrets sur le SCRS.

Ce processus fournit aussi au SCRS l'occasion de répondre officiellement aux études et aux décisions du CSARS et il s'inscrit dans le dialogue constant entre les deux organismes. Au cours de la période d'étude de 2011-2012, le CSARS a formulé neuf recommandations portant sur un vaste éventail de questions.

Le CSARS note avec satisfaction que le SCRS a donné suite à plusieurs de ces recommandations. Ainsi, le SCRS a été d'accord avec la recommandation faite par le Comité dans le rapport annuel 2011-2012 de mettre à jour la politique du Service sur les mises en garde, et ce, de manière à refléter les pratiques et processus actuels d'échange d'information avec les partenaires étrangers.


Étude du CSARS : Les relations et échanges du SCRS avec le Centre de la sécurité des télécommunications Canada (CSTC)

Contexte

La décision du gouvernement d’installer le siège du CSTC à côté du siège du SCRS illustre bien la tendance générale de fusionnement accru des mondes du renseignement d’origine humaine (HUMINT) et du renseignement d’origine électromagnétique (SIGINT), mondes autrefois bien distincts. Cette tendance s’est nourrie d’exigences gouvernementales de plus en plus grandes pour obtenir des renseignements pertinents de façon rapide, et ce, afin de maximiser l’efficacité opérationnelle dans un contexte de restrictions budgétaires, et de faire face à un contexte mondial de la menace en pleine évolution et de plus en plus complexe du point de vue technologique.

Cette étude, qui a examiné les initiatives opérationnelles et non opérationnelles, traite des avantages, pour le Service, d’une coopération accrue avec le CSTC. Elle s’est penchée sur les efforts concertés pour coordonner les services partagés, pour assurer un transfert interorganisationnel des connaissances suffisant, la façon dont les risques opérationnels sont gérés, la collecte de renseignement sans rapport avec la menace (cf. l’article 16 de la Loi sur le SCRS), et la pertinence de l’orientation et des politiques utilisées pour guider le SCRS dans son partage des renseignements avec le CSTC.

Étude du CSARS

L’étude a révélé qu’un certain nombre de défis empêchaient le SCRS et le CSTC de tirer pleinement parti des possibilités offertes par la nouvelle proximité de leurs sièges respectifs. Pour des organismes de renseignement en proie avec un problème accru de restriction de ressources, le partage de services permet une gestion efficace de celles-ci. Malheureusement, le Comité a constaté que les attentes initiales à ce sujet avaient peut-être été un peu trop grandes.

Bien que le CSTC n’ait pas encore pris pleinement possession des lieux, et que donc les bénéfices puissent être meilleurs que prévu, dans une large mesure, les avantages potentiels ont jusqu’à présent été minés par des problèmes de gestion, les restrictions budgétaires et des complications liées à l’installation du CSTC.

Globalement, le CSARS a constaté que le SCRS et le CSTC avaient des difficultés à comprendre leurs mandats respectifs et leurs responsabilités respectives. Cette entrave à la coopération a été soulevée aux niveaux opérationnel et de la gestion dans les directions opérationnelles du SCRS, et le problème a été reconnu lors des réunions conjointes des deux organisations. En outre, à cause de ces lacunes, dans certains cas, les politiques ou les procédures du SCRS n’ont pas été respectées, ce qui aurait pu avoir un impact négatif sur les risques liés aux opérations.

De son côté, le SCRS a reconnu les difficultés liées au chevauchement des mandats et, bien souvent, le problème des exigences particulières de l’imbrication des activités liées au déploiement ou à l’utilisation des sources humaines du SCRS ou de la technologie du CSTC. Parmi les solutions à ces problèmes présentées au Service, on note : mieux former les bureaux opérationnels du CSTC et du SCRS aux politiques pertinentes, et mettre sur pied un conseil d’administration des opérations pour assurer la gestion stratégique de ces activités.

La collecte de renseignements étrangers

L'article 16 de la Loi sur le SCRS définit le renseignement étranger comme toute information sur les moyens, les intentions ou les activités d'un État étranger, d'une organisation nationale ou d'un ressortissant étranger (c.-à-d. des renseignements sans rapport avec la menace). En revanche, l'article 12 de la Loi définit le renseignement de sécurité comme des informations et renseignements liés aux « menaces envers la sécurité du Canada ». Malgré la grande coopération avec le CSTC dans les activités de collecte de renseignements étrangers au Canada, le Service continue de débattre à l'interne sur la mesure dans laquelle ces activités ont un impact négatif sur le mandat principal du SCRS, qui est de recueillir des renseignements de sécurité. Après avoir écouté diverses sources du SCRS sur cette question, le Comité a mis en garde le Service, l'incitant à la prudence pour décider dans quelle mesure il continue à demander l'aide du CSTC dans le cadre de l'article 16. À moins que des modifications soient apportées à la Loi sur le SCRS, c'est le CSTC, et non le SCRS, qui est l'organisation principalement chargée de fournir au gouvernement du Canada des renseignements étrangers.

Partage de l’information

En dépit de l’encart qui précède, une grande partie de l’étude s’est penchée sur la façon dont le CSTC et le SCRS partagent les informations. Normalement, à chaque fois que le SCRS partage des informations, il utilise des « mises en garde » et/ou des « assurances ». Une mise en garde précise que l’information fournie appartient au SCRS, et ne peut être transmise à un autre organisme ou modifiée sans le consentement direct du Service. Une assurance est un accord bilatéral formel pris avec des organismes étrangers, et qui stipule que les informations du SCRS ne seront pas utilisées d’une manière qui va à l’encontre des conventions internationales relatives aux droits de la personne. La mesure dans laquelle les mises en garde et/ou les assurances sont efficaces dépend du degré de confiance entre le SCRS et l’organisation qui bénéficie des informations. Le CSARS a cependant constaté que davantage de collaboration entre le renseignement humain et le renseignement d’origine électromagnétique pouvait conduire à la perte potentielle de contrôle sur l’information partagée.

Si le Comité est parvenu à cette conclusion, c’est que les mises en garde et les assurances du SCRS n’ont jamais été conçues pour la collecte de renseignement d’origine électromagnétique. Contrairement à la collecte de renseignement humain, qui se fait souvent de façon autonome (à savoir recueillir des informations auprès d’une source humaine et, si on le désire, partager ensuite ces informations avec une organisation alliée), la collecte de renseignement d’origine électromagnétique est davantage un travail de groupe. Le CSTC appartient à une alliance spéciale qui comprend la National Security Agency (États-Unis), le Service gouvernemental d’écoutes et de transmission (Royaume-Uni), le Defence Signals Directorate (Australie) et le Bureau de la sécurité des communications du gouvernement de la Nouvelle-Zélande. Dans son rapport annuel 2011-2012, le Bureau du commissaire du CSTC notait que « compte tenu de la complexité croissante des défis technologiques, cette alliance axée sur la coopération peut être plus précieuse que jamais auparavant ».

De son côté, le SCRS estime que les échanges avec le CSTC ne présentent que de faibles risques. En effet, en dehors du partage, au sens large du terme, des informations, les agences alliées de SIGINT se concentrent principalement sur leurs propres priorités nationales en matière de renseignement. Toutefois, le CSARS est plus préoccupé par les cas dans lesquels les priorités de collecte de renseignements des alliées se sont heurtées à celles du Canada, comme dans les affaires de contre-terrorisme.

Le SCRS reçoit une orientation du ministre et a ses propres politiques pour prévenir l’utilisation abusive des renseignements et leur mauvaise utilisation, tant sur le plan de la sécurité que dans la perspective des droits de la personne. Cependant, le Comité ne voit pas très bien comment le SCRS peut se conformer aux instructions ministérielles stipulant que les mises en garde doivent être utilisées lors du partage de l’information avec des destinataires nationaux et étrangers alors que la nature même de collecte et de diffusion de SIGINT va à l’encontre de ce principe.

Le Service a avoué au CSARS que répondre à ces préoccupations était loin d’être simple, et que cela demeurait un « travail en cours ». Avec la collaboration plus poussée entre le SCRS et le CSTC, le Comité reviendra sur cette question dans de futures études afin d’évaluer les progrès qui ont été accomplis pour relever ce défi.

Un dernier enjeu : la cybersécurité

Dans la dernière section de cette étude, nous avons relevé une anomalie dans la relation entre le SCRS et le CSTC : un manque avéré de coopération en matière de cybersécurité. En 2010, Sécurité publique Canada a mis sur pied une stratégie pangouvernementale, la Stratégie de cybersécurité du Canada (la Stratégie), qui stipule qu’il ne peut y avoir aucune ambiguïté dans le rôle de chacun. La Stratégie confirme les rôles respectifs du CSTC et du SCRS : le premier est un expert reconnu dans le traitement des cybermenaces et des attaques, et ce dernier est, généralement parlant, chargé d’analyser les menaces nationales et internationales et d’enquêter sur celles-ci. Malgré cette Stratégie, l’étude du Comité a constaté qu’il y avait encore du travail à faire pour coordonner les activités liées à l’Internet du SCRS avec celles du CSTC, en particulier en ce qui concerne la protection d’information et d’infrastructures électroniques d’importance du gouvernement du Canada.

Compte tenu de l’inévitabilité de la coopération accrue entre le CSTC et le SCRS, le CSARS recommande que le SCRS élabore des principes généraux de coopération entre les deux organisations plus clairs et plus solides. Ces principes devraient répondre au nombre croissant de défis qui ont surgi entre les deux entités, tout en respectant leurs mandats respectifs.


Étude du CSARS : Examen du nouveau pouvoir octroyé au moyen de mandat en vertu de l’article 21

Contexte

Il s’agit là du premier examen du CSARS d’un nouveau pouvoir octroyé au moyen de mandat en vertu de l’article 21 de la Loi sur le SCRS, qui a été à l’origine autorisé par la Cour fédérale en 2009. Il lui a été octroyé pour que le Service puisse continuer à suivre les cibles qui représentent une menace pour le Canada lorsqu’elles voyagent à l’étranger ou, dans certains cas, y résident. L’étude s’est penchée sur les processus, les politiques et les contrôles que le SCRS a mis en place pour gérer ce nouveau pouvoir, ainsi que sur la coopération et les échanges avec des partenaires canadiens du Service. Elle a également cherché à évaluer l’importance de l’information, obtenue par voie de ce pouvoir, pour les enquêtes du Service.

Étude du CSARS

Au cours de la période durant laquelle l’étude a été menée, 35 mandats (plus sept mandats supplémentaires) ont été décernés par voie du nouveau pouvoir. Le Comité a constaté que plusieurs défis s’étaient posés au SCRS, notamment l’efficacité de la collecte de renseignement, le contrôle sur l’information recueillie, et des attentes peut-être irréalistes pour l’avenir. En effet, il a été noté que s’appuyer sur des organismes partenaires canadiens et étrangers pour la collecte de renseignements se fait finalement au détriment d’une certaine efficacité. De grands progrès ont été faits depuis l’émission du premier mandat, mais le SCRS est encore dans une phase d’apprentissage et le Service devra gérer les attentes et les réalités, notamment les limites, des rapports s’appuyant sur des renseignements ainsi obtenus.

Dans presque tous les cas, le SCRS mise sur la communauté du Groupe des cinq (soit le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Australie et la Nouvelle-Zélande) pour tirer le meilleur parti de la collecte de renseignements dans le cadre du nouveau pouvoir octroyé au moyen de mandat. Le CSARS a noté que, même avec l’aide d’alliés, la collecte de renseignements ou les informations obtenues par voie de de ce pouvoir avaient présenté des avantages et des défis que le Service n’avait initialement pas prévu.

Les ententes avec les partenaires et alliés donnent aussi à d’autres organismes la possibilité d’agir indépendamment sur la base des informations provenant du SCRS. Dans la pratique, si un organisme allié collecte des renseignements sur un citoyen canadien, c’est un organisme canadien qui devrait idéalement prendre en charge le dossier sur la base d’une entente informelle régissant les interactions entre la communauté du Groupe des cinq. Néanmoins, il est entendu que chaque nation alliée se réserve le droit d’agir dans son propre intérêt national. Par exemple, la législation sur la sécurité nationale aux États-Unis et au Royaume-Uni leur donne le pouvoir de se réserver l’information et d’agir en conséquence si elle touche à la sécurité nationale, et ce, même si elle a été recueillie pour le compte d’un autre pays, comme le Canada.

Mandats

Mandats
  2010-11 2011-12 2012-13
Total 231 206 236
Nouveaux mandats 55 50 71
Mandats remplacés ou mandats supplémentaires 176 156 165

Le risque auquel le SCRS fait donc face est la capacité d’un partenaire de la communauté du Groupe des cinq d’agir indépendamment sur la base des informations provenant du Service. Cela pourrait conduire à la détention d’une cible, ou à un préjudice envers celle-ci, et ce, toujours sur la base d’informations provenant du Service. Le CSARS a conclu que même si miser sur des partenaires dans le cadre de l’exécution de ce nouveau pouvoir octroyé au moyen de mandat présentait des avantages (et le recours à la communauté est essentiel pour que le processus soit efficace), des risques clairs se posaient également, notamment le manque de contrôle sur l’information une fois partagée.

Conclusions

Le CSARS a noté des signes que le Service avait commencé à utiliser des mises en garde qui stipulent que les organismes alliés doivent communiquer avec le SCRS s’ils agissent sur la base d’informations provenant du Service. Les mises en garde, sous leur forme actuelle, sont toujours considérées comme un « travail en cours » par le Service, mais elles ne répondent pas encore à la réalité plus vaste de ce type de collecte de renseignement. Néanmoins, elles restent un outil utile et, dans une certaine mesure, offrent au Service une protection, qui comporte cependant des défis, notamment le contrôle de l’information qu’il cherche à recueillir. Le CSARS a recommandé au SCRS de concevoir un système de protection approprié pour le partage de l’information émanant du Service, et de se tenir informé du mieux possible sur l’usage potentiel de ses informations.

En outre, la plupart de ces mises en garde, qui rentrent dans le cadre plus large du régime des « garanties », n’ont été utilisées qu’avec un partenaire. Le CSARS recommande donc que, dans le cadre de ce nouveau pouvoir octroyé au moyen de mandat, le SCRS étende l’usage de mises en garde et de garanties aux organismes de toute la communauté du Groupe des cinq, afin de s’assurer que nulle information ne soit diffusée à l’insu du Service.


Étude du CSARS : Le travail d’enquête liée à l’espionnage et à l’influence étrangère

Contexte

La priorité numéro un pour le SCRS reste la lutte contre les menaces terroristes. Cependant, le Canada fait face à un niveau d’activité d’espionnage comparable à celui qui existait lors de la guerre froide, et les nations impliquées dans ces activités parrainées par l’État changent de tactique. Afin de répondre à ce défi, le rôle principal du SCRS est de conseiller les ministères du gouvernement du Canada pour les aider à mieux comprendre les menaces émergentes liées aux nouvelles formes d’espionnage et de contre-espionnage, et à demeurer conscients des intérêts de certaines nations en matière de politique étrangère, de commerce et de renseignements.

Étude du CSARS

Cette étude a examiné la manière dont le SCRS fait face à la menace posée par l’évolution rapide des activités d’espionnage et d’influence de nations étrangères. Du point de vue du Service, les nouveaux défis et la complexité des enquêtes sur ces activités sont autant d’occasions de regarder au-delà des formes traditionnelles d’espionnage et de se plonger dans de nouveaux domaines opérationnels. Le CSARS s’est ici penché sur les conseils que le SCRS prodigue face à différentes formes d’activités influencées par l’étranger.

Au sein même du pays, diplomates, officiers du renseignement, et dirigeants d’entreprises nationales étrangères mènent des activités clandestines afin de faire progresser les intérêts de leurs pays respectifs – ces pratiques existent depuis longtemps. De telles activités influencées par l’étranger deviennent plus graves lorsque les cibles stratégiques sont de hauts fonctionnaires canadiens ou d’éminents membres des milieux d’affaires. Bien que certaines des relations stratégiques que mènent les représentants nationaux étrangers relèvent du cadre diplomatique, ces activités sont considérées comme une menace et dignes de l’intérêt du SCRS quand ces personnes essaient secrètement d’obtenir des informations ou d’influencer la prise de décision.

L’un des défis du SCRS est de continuer à faire la distinction entre les activités dites clandestines et celles qui relèvent de la diplomatie légitime. Autrefois, déceler des formes dissimulées d’influence étrangère était peut-être plus simple, car des approches traditionnelles étaient utilisées et les agents d’influence étrangers faisaient généralement l’objet d’enquêtes du Service. Cependant, les méthodes auxquelles les acteurs étrangers ont recours évoluent constamment.

Dans le cas des activités influencées par l’étranger examinées ici, les aspects négatifs se posent clairement : les principes démocratiques sont remis en question par un gouvernement étranger. Toutefois, les éléments clandestins de ces activités ne sont pas si évidents. Du point de vue du Comité, un certain nombre d’activités qui donnent lieu à une enquête semblent être menées au grand jour, et non de façon clandestine. Le CSARS a noté que, bien que les acti­vités des États étrangers pouvaient être organisées et ciblées, leur caractère ne constituait pas en lui-même un indicateur d’activité secrète.

Les enquêtes sur l’espionnage et les activités influencées par l’étranger continuent de prendre de l’ampleur et de gagner en complexité, et le défi de faire la distinction entre ce qui est clandestin et ce qui est légitime sera aussi de taille. Le CSARS estime que clarifier cette distinction est important, car la collecte d’informations sur les questions liées à la menace doit, conformément à la Loi sur le SCRS, être « strictement nécessaire ». Le CSARS recommande que le SCRS réajuste de façon appropriée ses politiques et pratiques, et ce, pour aider les enquêteurs et analystes à identifier des seuils communs et cohérents, et pour évaluer quand une activité passe dans le domaine clandestin.

Peaufiner l’approche

Au cours des dernières années, les agents d’ingérence étrangers ont ciblé des personnes et des groupes dans de plus petites tranches de la société canadienne, et ce, afin de tirer parti de ces relations pour gagner une plus grande influence au niveau national. Par exemple, certains éléments étrangers ont tenté de se rapprocher de diverses tranches de la société pour possiblement tenter de contourner d’autres autorités, comme le gouvernement fédéral, ou les gouvernements provinciaux ou municipaux. Souvent, le SCRS alerte les parties concernées (par exemple, des hommes politiques, des dirigeants d’entreprise, des universitaires et autres personnalités influentes) en leur offrant des informations et des conseils en matière de sécurité, mais toutes les communautés touchées ne bénéficient pas de telles mesures.

Le SCRS préfère parfois l’approche attentiste pour plusieurs raisons. Il se peut que le Service n’ait pas suffisamment d’informations précises sur les cibles potentielles ou sur la stratégie offensive prévue. Il est également préoccupé par la façon dont son message, quel qu’il soit, peut être perçu par certaines communautés, et si ce message sera vu de manière positive. Le Comité reconnaît les préoccupations du Service, néanmoins, ne pas informer toutes les communautés canadiennes des questions de sécurité autour d’une menace particulière, mais renseigner les autres pans de la société, pose problème. En essayant de rassembler des informations sur les activités influencées par l’étranger sans en informer toutes les communautés, le SCRS pourrait causer davantage de méfiance, surtout si ces communautés apprennent les activités du Service par d’autres moyens. Ainsi, le CSARS recommande que le SCRS élabore une stratégie visant à offrir les mêmes messages d’avertissement sur les activités influencées par l’étranger à tous les secteurs potentiellement touchés par de telles activités.

Une inquiétude croissante

Au cours des dernières années, le gouvernement du Canada a montré un intérêt croissant envers les risques potentiels pour la sécurité nationale posés par les sociétés d’État étrangères. Le SCRS a informé le CSARS que les conseils que le Service prodigue au gouvernement du Canada sur ces sociétés ne visaient pas à mettre un terme aux investissements, mais plutôt à informer le gouvernement pour qu’il prenne des décisions éclairées en matière de commerce et de relations avec les partenaires étrangers. Le SCRS participe également au processus de la Loi sur Investissement Canada. Le Règlement sur les investissements susceptibles de porter atteinte à la sécurité nationale a été enregistré en 2009, et il est devenu un nouveau secteur d’activité pour le SCRS. L’un des buts de la Loi sur Investissement Canada est d’examiner les investissements importants effectués au Canada par des sociétés étrangères. Le rôle du SCRS dans le processus d’examen de la Loi sur Investissement Canada est, en partie, de fournir des informations sur les investisseurs ainsi que leurs antécédents. Malgré les courts délais accordés à ce travail, le Service est un maillon important du processus global dans lequel le ministre de la Sécurité publique aide le ministre de l’Industrie à déterminer si l’investissement proposé pourrait être ou serait préjudiciable.

Les récents accords du Canada en matière de politique étrangère et de commerce international se traduiront probablement par de plus grandes exigences des clients pour obtenir des informations sur les sociétés d’État étrangères, et autres questions ayant trait à l’économie ou à la prospérité du pays. Le CSARS suivra l’évolution de la participation du SCRS dans ces processus avec intérêt dans les années à venir.

Dans ce dossier, le CSARS a conclu que le SCRS avait globalement agi de façon appropriée en vertu des politiques opérationnelles actuelles. Cependant, quelques ajustements pourraient être nécessaires au fur et à mesure que les nations étrangères élaborent de nouvelles stratégies. Il sera intéressant pour le CSARS de voir quelle tournure prendront les enquêtes du SCRS sur les menaces posées par l’espionnage et les activités influencées par l’étranger des gouvernements étrangers.


Étude du CSARS : Les initiatives du SCRS en matière de collecte à l’étranger

Contexte

En février 2013, le directeur du SCRS, Richard Fadden, notait que le Service savait que « des dizaines de Canadiens » ont voyagé à l’étranger ou ont tenté de le faire pour se livrer à des activités liées au terrorisme. Le SCRS espère que les activités de collecte à l’étranger aideront à combler ce manque d’information. En effet, le CSARS a aussi vu comment l’orientation du gouvernement et les questions émergentes, comme les enlèvements et les migrations illégales, demandaient au Service de faire état des activités à l’étranger. Les opérations de collecte à l’étranger permettent au SCRS d’identifier les menaces avant qu’elles ne touchent le Canada, et l’aident à moins dépendre des rapports des alliés, en concentrant ses efforts de collecte sur les menaces d’origine étrangère pour le pays.

Étude du CSARS

Cette étude s’est penchée sur les efforts de deux directions pour améliorer leurs capacités de collecte de renseignements à l’étranger. Elle prolonge l’examen en cours du CSARS sur la façon dont le SCRS fonctionne à l’étranger avec les services de renseignement partenaires, tout en travaillant de façon autonome pour combler les lacunes en matière de renseignement. Les deux directions ont travaillé avec les différents bureaux régionaux du SCRS afin d’élaborer des cadres définissant les priorités en matière de collecte de renseignement, les méthodes et les buts de la collecte à l’étranger, et les liens de celles-ci aux préoccupations canadiennes. Les documents décrivant ces initiatives sont fréquemment mis à jour pour refléter l’évolution constante de la menace ou les changements sur les lacunes en matière de renseignement.

En mars 2012, le SCRS a créé une unité dédiée à la formation sur les opérations, et ce, en partie parce que le Service a reconnu qu’il s’aventurait davantage dans des zones plus dangereuses. Les modules de formation sont adaptés à l’opération en question, et comprennent un mécanisme de rétroaction. L’intégration systématique d’un tel mécanisme est un excellent moyen d’assurer une meilleure formation, et le CSARS a constaté que les leçons apprises et l’approche itérative adoptée dans l’élaboration des modules de formation étaient une bonne pratique.

L’un des avantages majeurs de ces modules de formation est de permettre au SCRS de poser un regard critique sur les lacunes opérationnelles, et ce, façon continue. La formation et l’évaluation peuvent également introduire une certaine dose d’objectivité, et aider à atténuer les divergences d’opinions quand il s’agit de décider d’opérer dans un milieu potentiellement dangereux. Le CSARS soutient le développement de la formation opérationnelle, et recommande que le Service veille à ce que toutes les personnes jugées prioritaires pour la formation en bénéficient, surtout si elles travaillent dans un milieu dangereux.

Dans l’ensemble, le CSARS a constaté que le SCRS avait adopté une approche mesurée et prudente dans les initiatives examinées dans cette étude. La sécurité demeure de la plus haute importance et a été mentionnée à toutes les séances d’information du CSARS. Le Comité n’a vu aucun signe que des personnes soient incluses dans toute nouvelle initiative s’il était estimé que cela poserait un danger, ou si un certain succès n’était pas attendu. Le CSARS a également été rassuré de trouver un message cohérent soulignant le fait que l’objectif principal des bureaux régionaux et des programmes de collecte restait la collecte de renseignement au Canada, et que cette activité ne prendrait jamais le dessus sur la collecte de renseignement à l’étranger. En ce qui concerne les activités à l’étranger, le CSARS recommande que le SCRS élabore un cadre juridique décrivant les activités acceptables et interdites, notamment les niveaux d’approbation correspondants au sein même du Service et en dehors de celui-ci.


Étude du CSARS : L’évolution de la marque du SCRS à l’étranger

Contexte

Les postes du SCRS à l’étranger sont situés à des endroits stratégiques afin de répondre aux besoins en matière de renseignement du gouvernement du Canada, et notamment l’appui au filtrage de sécurité des bureaux à l’étranger de Citoyenneté et Immigration Canada, la liaison avec d’autres partenaires (canadiens ou internationaux) situés à l’étranger, et la collecte de renseignements sur d’éventuelles menaces contre le Canada ou les intérêts canadiens. À l’exception des postes situés à Paris, Washington et Londres, et à la présence du SCRS en Afghanistan, l’emplacement des postes à l’étranger reste une information classifiée. D’habitude, les études du CSARS se penchent sur les efforts de liaison et les activités opérationnelles d’un seul poste à l’étranger. Cette année, le CSARS a adopté une perspective plus vaste, et a abordé la présence du SCRS à l’étranger au sens large du terme, en mettant l’accent sur le processus décisionnel autour de l’approche globale du Service en matière de représentation à l’étranger.

Étude du CSARS

Des éléments clés, notamment les critères d’ouverture et de fermeture des postes, les défis liés au travail à l’étranger, et l’évaluation des ententes avec des organismes étrangers, ont donné le ton de cette étude. Dans l’ensemble, le CSARS a constaté que le SCRS, qui essaie d’élargir son rôle opérationnel à l’étranger, adopte une approche stratégique et mise sur ses rôles en matière de liaison et d’activités opérationnelles. Néanmoins, le CSARS a souligné quelques problèmes notables, notamment l’exactitude des renseignements fournis dans certains de ses profils d’ententes, la manière dont les priorités sont déterminées lors de la collecte de renseignement à l’étranger pour des besoins spécifiques, et les implications entourant la viabilité à long terme d’un rôle plus opérationnel plutôt qu’un rôle de liaison.

L’étude n’a pas pu répondre à la question générale de savoir si le SCRS était appelé à faire plus avec moins. Le CSARS a fait plutôt remarquer que la marque du SCRS à l’étranger évoluait au lieu de s’étendre, et que les exigences du gouvernement, notamment en matière de restrictions budgétaires, avaient encouragé une approche dynamique envers cette évolution. De nouvelles stratégies sont en place, et le SCRS espère qu’elles offriront la flexibilité nécessaire pour répondre à ses exigences en matière de collecte en cours et aux nouveaux enjeux qui pourraient surgir et demander l’attention du Service.

Cependant, pénétrer dans des zones riches en matière de collecte de renseignements présente des défis, et le CSARS a souligné que les possibilités existantes ne les résolvaient pas complètement. Par exemple, le personnel d’un poste nous a décrit les défis de la gestion des exigences contradictoires auxquelles le SCRS doit faire face dans ses tâches administratives quotidiennes, ainsi que dans les fonctions de liaison clés et les activités opérationnelles complexes. Cet exemple souligne bien certaines des différences qui existent entre les postes qui se concentrent sur le travail de liaison et les postes plus opérationnels situés dans d’autres parties du monde.

L’évolution de la présence opérationnelle à l’étranger rime aussi avec des changements dans la façon dont le SCRS traite avec les agences de renseignement étrangères, notamment l’amélioration des dispositifs existants, la réactivation des relations suspendues ou latentes, et la recherche de nouveaux partenariats. Dans certaines parties du monde, l’obligation de travailler et de traiter avec un petit nombre de partenaires qui peuvent poser problème est inévitable, et crée des défis supplémentaires. Cette réalité se juxtapose néanmoins à un questionnement raisonnable et à des recherches sur les antécédents douteux de certains de ces organismes et leur personnel.

Le Service peut, conformément à l’article 17 de la Loi sur le SCRS, conclure des ententes avec des entités étrangères. Un autre défi, tant en termes de travail de liaison que de conduite des opérations à l’étranger, est le risque de corruption dans certains de ces organismes. Dans une entente que le CSARS a examinée, des préoccupations antérieures relatives à la corruption avaient conduit à la suspension temporaire de cette relation. Ces possibles problèmes de corruption existaient toujours quand le Service a tenté de ranimer l’entente pour répondre à certains besoins opérationnels, mais il a adopté une approche progressive axée sur la gestion des risques. Le CSARS a constaté qu’avant de ranimer l’entente avec l’agence étrangère, le SCRS avait pris des mesures appropriées pour évaluer les problèmes actuels de corruption.

Les informations relatives aux ententes avec les entités étrangères se trouvent à l’article 17, « Ententes de coopération », de la Loi sur le SCRS. Ces profils d’ententes sont utilisés pour informer le directeur, les cadres, les directions et les bureaux régionaux, ainsi que les départements et entités externes, notamment le CSARS; leur précision et pertinence sont donc de la plus haute importance. Le Comité a constaté certaines lacunes en matière de contenu dans les trois profils d’ententes qu’il a examiné. Il a aussi noté que, dans au moins un cas, des informations essentielles contenues dans un dossier de source n’avaient pas été utilisées pour mettre le profil à jour.

Le CSARS avait déjà émis des commentaires sur l’exactitude et le maintien à jour des profils établis en vertu de l’article 17 et, malgré des progrès en ce qui concerne les mises à jour régulières, il reste un besoin d’améliorations significatif, notamment pour remplir les documents. Comme le CSARS a entendu tout au long de cette étude, les opérations à l’étranger ne sont plus l’exception, mais la norme actuelle. Des informations précises et à jour sur les agences étrangères sont donc cruciales, pour le succès de l’opération, mais aussi pour le maintien de bonnes relations de liaison.

Alors que les opérations à l’étranger prennent de l’importance et évoluent, l’exactitude des renseignements dans les profils d’ententes devient plus importante que jamais. Le CSARS recommande donc que le SCRS prenne des mesures immédiates pour s’assurer que les profils en vertu de l’article 17 sont toujours exacts, complets, à jour et pertinents.


Étude du CSARS : L’appui du SCRS au périmètre de sécurité du Nord du Canada

Contexte

Le Nord du Canada est en plein bouleversement : il subit les impacts du changement climatique, bénéficie des progrès de l’exploration minière et des hydrocarbures et de l’exploitation de ces ressources, ainsi que du développement des gouvernements et institutions autochtones et du Nord. Cependant, les regards qui se portent sur cette vaste région ne sont pas tous désintéressés : les questions de sécurité nationale dans le Nord, longtemps perçues comme une menace révolue après la guerre froide, reviennent sur le devant de la scène dans les médias, le domaine académique et au niveau du gouvernement.

Chacun des huit États circumpolaires (c.-à-d. le Canada, la Finlande, le Groenland [Danemark], l’Islande, la Norvège, la Russie, la Suède et les États-Unis) a sa propre définition de ce qui constitue la région circumpolaire, l’Arctique et le Nord. Le Canada tend à différencier le « Nord proche » du « Grand Nord ». Le Nord proche est généralement défini comme la masse terrestre entre 50° et 60° de latitude, tandis que le Grand Nord englobe toutes les régions situées au nord du 60e parallèle (c.-à-d. l’Arctique). Ces distinctions sont importantes pour le SCRS, car différentes considérations opérationnelles, financières et en matière de liaison, s’appliquent dans les activités dans le Nord proche et le Grand Nord du Canada.

Étude du CSARS

Promouvoir les intérêts du gouvernement dans le Nord est devenue une priorité ces dernières années. Cette étude a porté sur la ou les raisons qui appuient les efforts du SCRS dans la sécurisation du périmètre nord du Canada. En particulier, l’étude a examiné l’ampleur de la ou des menaces telles qu’elles sont perçues par le Service, la façon dont les ressources consacrées à cette question sont gérées (au siège et dans les bureaux régionaux du SCRS), les activités de liaison du SCRS avec les partenaires du Nord et la façon dont les initiatives opérationnelles ont été élaborées et mises en œuvre.

En particulier, le CSARS a constaté que le SCRS faisait face à un certain nombre de défis imprévus suite à la décision du gouvernement en 2010 de désigner l’Arctique comme un « enjeu » en matière de renseignement et de sécurité. Le Service n’avait à ce jour pas joué de rôle important dans la collaboration avec les parties prenantes sur les enjeux liés au Nord. En l’absence d’un portefeuille dédié à l’Arctique, les ressources ont été utilisées pour enquêter sur ce qui avait été toujours été un nombre restreint de menaces. Le SCRS a donc dû faire face à une question qui, jusque-là, avait été considérée comme une priorité relativement faible.

Bien que le gouvernement ait encouragé le SCRS à réorienter ses ressources pour répondre à cette nouvelle priorité, le CSARS a constaté que les efforts du Service dans cette voie avaient été difficiles à mettre en œuvre en raison d’une autre priorité gouvernementale, les restrictions budgétaires. Celles-ci ont été décrétées précisément lorsque le SCRS tentait de réévaluer l’importance relative des menaces dans le Nord, leur complexité, et la façon dont les ressources devraient être consacrées au ciblage et au recrutement de sources.

En 2011, le SCRS a reçu de nouvelles directives plus précises sur les attentes par rapport au Nord du Canada. Elles ont été suivies d’une réorganisation interne des responsabilités au sein du Service, visant à accroître l’efficacité et l’efficience des ressources dédiées au sujet. Le CSARS a constaté que suite à ces nouvelles directives et à la réorganisation régionale, la gestion stratégique du SCRS de la question du Nord était devenue plus cohérente avec l’approche adoptée pour d’autres responsabilités régionales.

Des défis subsistent malgré les nouvelles directives et les changements organisationnels. Tout d’abord, la prévalence générale d’une attitude généralisée (au « sud ») d’indifférence envers le Nord du Canada. Celle-ci doit être surmontée à chaque fois que des considérations relatives aux enquêtes (ou à une demande subséquente de financement pour celles-ci) sont discutées. Ensuite, il existe des priorités opérationnelles au sud du pays (et à l’étranger) auxquelles on consacre la majeure partie des ressources du SCRS. Enfin, les restrictions budgétaires, toujours d’actualité, limitent les possibilités opérationnelles. À cela s’ajoute l’absence d’une stratégie du siège du SCRS visant à orienter les efforts du Service dans le Nord : le Service se repose sur les responsabilités régionales partagées, ce qui peut compliquer la priorisation des initiatives.

Le CSARS a constaté que, d’un commun d’accord, les gestionnaires du SCRS jugeaient le statu quo satisfaisant, mais que certains hauts fonctionnaires estimaient que sur le long terme (cinq ans ou plus), le siège du Service allait devoir jouer un rôle plus important. Le CSARS est de cet avis. Pour commencer, il serait bon que le SCRS mène une étude interne sur l’établissement d’une stratégie opérationnelle à long terme pour le Nord du Canada, comme il s’efforce de le faire avant une expansion à l’étranger. Une telle approche cadrerait bien avec l’importance de la question aux yeux du gouvernement, et permettrait de mieux positionner le Service pour faire face aux exigences de sécurité nationale quand elles prendront (et non « si elles prenaient ») de l’importance au sein de la frontière septentrionale du Canada.

Quelle que soit la manière spécifique dont une telle approche est mise en œuvre, le CSARS recommande que le SCRS « institutionnalise les responsabilités » en matière d’initiatives dans le Nord, et ce, en demandant au siège du Service d’établir des objectifs de liaison et opérationnels sur plusieurs années. Le Servicedoit aussi s’assurer que des ressources sont engagées à l’appui de tels objectifs.


Étude du CSARS : Les activités du SCRS liées aux enquêtes nationales et aux questions émergentes

Contexte

Pour le SCRS, l’extrémisme intérieur se caractérise par la volonté d’individus ou de groupes, au Canada, d’utiliser la violence ou la menace de violence à des fins politiques et/ou idéologiques. Le SCRS consacre la plupart de ses ressources au contre-terrorisme à l’extrémisme religieux; cependant, il continue également à surveiller les individus et les organisations qui pourraient être impliqués dans d’autres formes de terrorisme, notamment dans des actes de violence liée à des questions telles que les droits des animaux, l’environnement, l’antimondialisation, et la suprématie blanche. Le niveau de violence associé à ces thèmes nationaux a tendance à fluctuer, et tourne souvent autour d’événements ou de questions à l’ordre du jour. D’ailleurs, la grande majorité de ces activités relèvent bien du domaine de la protestation légitime. Ces dernières années, le niveau de menace associé à un certain nombre de ces enquêtes internes a été réévalué, en particulier avec la clôture d’événements de grande envergure qui ont pris place en 2010 (par exemple, les Jeux olympiques et paralympiques de Vancouver, et les Sommets du G8 et du G20), autour desquels a gravité une violence ou des menaces accrues de violence temporaire. Le SCRS a donc apporté des changements à la façon dont il enquête sur l’extrémisme intérieur non religieux suite à la réévaluation de la menace.

Étude du CSARS

Cette étude s’est penchée sur le nouveau cadre du SCRS et les enquêtes effectuées après 2010. Aux fins de l’étude, le CSARS s’est déplacé dans un bureau régional dans lequel étaient menées des enquêtes actives liées à des activités extrémistes au Canada. Le CSARS souhaitait savoir comment les changements dans l’approche adoptée par le Service en matière d’extrémisme intérieur affectaient la stratégie nationale et les enquêtes locales. Le Comité a constaté que le nouveau cadre d’enquête récemment révisé dont le Service se sert désormais offre plus de souplesse pour collecter des renseignements et communiquer sur ces menaces, quel que soit l’idéologie dont elles relèvent ou le groupe auquel elles appartiennent, et était plus logique et solide du point de vue de l’efficacité des recherches. Le Comité a aussi examiné certains dossiers et rapports opérationnels pour s’assurer que les enquêtes étaient menées de manière appropriée et raisonnable, c’est-à-dire dans le respect de la politique interne et du mandat du SCRS. Le CSARS a constaté que les activités liées uniquement à la protestation légitime et à la dissidence n’avaient pas été traitées, et que le Service avait mis fin aux rapports opérationnels sur plusieurs anciennes cibles. Le Comité a aussi noté que le SCRS avait rapidement mis un terme aux enquêtes sur les personnes qui n’étaient plus considérées comme des menaces après les grands événements 2010, et a encouragé le Service à faire preuve de vigilance à l’égard d’événements ou d’enjeux futurs.

Un défi demeure : le besoin inévitable du gouvernement d’obtenir des informations sur des menaces actuellement latentes, mais qui peuvent refaire surface rapidement. Le Service doit donc rester au courant des questions névralgiques ou des éléments déclencheurs possibles qui peuvent nourrir l’extrémisme intérieur et causer une menace à la sécurité nationale. En outre, en se tenant informé, le Service doit faire en sorte de ne pas empiéter sur les formes légitimes de protestation. En fin de compte, ce sont les partenariats du Service avec les organismes d’application de la loi qui peuvent être la meilleure source d’information : les fonctionnaires chargés du maintien de l’ordre peuvent connaître des individus impliqués dans des activités criminelles, et qui sont susceptibles, à un moment donné, de constituer une menace selon le mandat du SCRS en matière d’enquête sur l’extrémisme intérieur. Certains partenariats avec les organismes d’application de la loi ont porté leurs fruits, tant dans des affaires où le Service ne menait plus d’enquête sur les anciennes menaces que dans de nouveaux domaines que le SCRS doit surveiller au cas où un lien avec une question de sécurité nationale se crée. Dans l’ensemble, le CSARS encourage l’orientation du Service en matière de liaison avec ses partenaires canadiens.

Ciblage

Lorsque le Service a des motifs raisonnables de soupçonner un individu ou une organisation de représenter une menace pour le Canada, il doit d'abord ouvrir une enquête. La figure ci-dessous indique le nombre de cibles (arrondi à la dizaine la plus proche) sur lesquelles le SCRS a enquêté au cours des trois derniers exercices financiers.

Figure 1 - Statistiques sur les enquêtes
  2010-2011 2011-2012 2012-2013
Cibles 470 410 496

Étude du CSARS : Le recours du SCRS aux méthodes clandestines

Contexte

Les méthodes clandestines (également souvent connues sous le nom « d’espionnage ») comprennent un large éventail de techniques spécifiques dont les risques sont mesurés, et donnent au Service les garanties de secret et de sécurité nécessaires pour l’assister dans ses tâches et fonctions. Les opérations du Service ont pris de l’ampleur, et ce, au Canada et à l’étranger, et les cibles ont des moyens de plus en plus perfectionnés. Le besoin s’est donc fait sentir d’améliorer les méthodes clandestines pour aider le Service à mieux protéger l’identité de ses employés, ses processus et ses sources d’information. Cette étude traite de l’une des méthodes spécialisées du SCRS.

Étude du CSARS

Le CSARS a examiné les documents pertinents et a parlé aux employés du SCRS responsables de l’élaboration, du traitement et de la logistique de cette méthode secrète. Les questions suivantes ont été abordées : les justifications de l’usage de cette méthode, les types de scénarios dans lesquels le Service y a recours, le niveau de vérification, d’accès et de contrôle pour s’assurer que le matériel technique n’est pas utilisé à mauvais escient par les employés (et la satisfaction du CSARS en la matière) et, enfin, un examen des diverses relations que le SCRS doit maintenir pour assurer la gestion efficace de cette méthode.

La Direction de la vérification interne du SCRS avait déjà effectué une évaluation de cette méthode clandestine; l’un des objectifs supplémentaires du CSARS était donc d’examiner le niveau de réponse aux recommandations découlant de la vérification. Dans l’ensemble, notre étude a révélé que le Service y avait depuis apporté de nombreuses améliorations, notamment l’élaboration d’un cadre stratégique plus complet et d’un ensemble de lignes directrices pour mieux soutenir l’usage croissant de cette méthode secrète.

Les bureaux régionaux du SCRS se partagent la responsabilité de l’usage de cette méthode. Cette approche donne aux gestionnaires régionaux la souplesse nécessaire pour recourir à la méthode en fonction de leurs besoins opérationnels, tout en laissant au siège un certain contrôle, notamment la création d’une base de données centralisée, et la formation d’une unité spécifique qui agit en tant que « centre des politiques » dans l’utilisation de la méthode. Un certain nombre de défis liés à la responsabilité financière se posaient avant l’audit interne du SCRS. Le CSARS a constaté que des exigences supplémentaires en matière de rapports financiers avaient été mises en place, et que d’autres améliorations étaient en cours.

Le SCRS a informé le Comité qu’au cours de la période sur laquelle l’étude porte, aucun cas où un employé du Service a été reconnu coupable d’un manquement à la sécurité et/ou impliqué dans une infraction à la sécurité liée à l’utilisation de cette méthode ne s’est présenté. Toutefois, le Comité a noté que, dans un cas au cours des dernières années, la sécurité de la méthode avait été compromise, mais que l’affaire avait été de nature procédurale/administrative et qu’elle n’avait pas causé de préjudice ou de risques importants. Les principaux intéressés à l’interne ont géré le problème, et les détails de l’affaire ont été classés dans un dossier, conformément à la politique du SCRS. Ici, bien que le Comité se soit montré globalement satisfait de la façon dont le problème a été traité, il a constaté l’absence de procédure établie exigeant que les autres régions du SCRS soient rapidement informées des leçons apprises à la suite d’une infraction de sécurité impliquant une méthode. Dans cette optique, le CSARS recommande que la politique du SCRS soit modifiée pour s’assurer que toutes les parties sont informées des leçons apprises à la suite d’une infraction de la sécurité suspectée ou confirmée concernant l’usage de cette méthode secrète.

Devant les préoccupations croissantes quant à la nécessité de mieux protéger les employés, les processus et les sources d’information du SCRS, l’usage de cette méthode est devenu de plus en plus fréquent. Pourtant, elle a créé divers problèmes de gestion, et l’un des plus pressants se trouve être la nécessité de maintenir les ressources humaines nécessaires pour assurer son utilisa­tion efficace. L’une des solutions que le SCRS est en train d’élaborer est le recours à l’utilisation de matériel technique/d’un programme complémentaire pour aider à alléger cette charge de gestion. Bien que cette nouvelle initiative semble prometteuse, le CSARS a conclu que la politique de ce programme d’accompagnement était insuffisante, et qu’elle contredisait les principes d’autres politiques connexes. Le Comité recommande donc que le SCRS mette immédiatement à jour sa politique sur ce nouveau programme afin qu’elle soit plus en phase avec les autres politiques opérationnelles.

Le SCRS a fait bien des progrès dans l’utilisation de méthodes clandestines depuis la création du Service en 1984. En effet, l’une des pierres angulaires du succès de toute agence de renseignement est de mener ses opérations sans être observée. Le SCRS ne pourrait pas fonctionner efficacement sans avoir recours à des méthodes clandestines. Le Service prend des mesures novatrices pour améliorer la sécurité de ses diverses activités au Canada et à l’étranger, et de nouveaux défis ne manqueront pas de surgir. Le Comité se penchera donc sur d’autres aspects des méthodes clandestines du SCRS dans de futures études.


Étude du CSARS : Le rôle du SCRS dans l’affaire Abdelrazik

Contexte

Abousfian Abdelrazik, qui possède la double nationalité soudanaise et canadienne, a été arrêté par les autorités soudanaises en septembre 2003. Il est resté en exil au Soudan pendant six ans sans pouvoir rentrer au Canada. Début 2009, les médias canadiens ont déclaré que son arrestation et sa détention avaient été demandées par des agents du renseignement de sécurité du Canada, une accusation que le SCRS a toujours niée. Suite à ces allégations, le directeur du SCRS s’est adressé publiquement au président du CSARS, pour demander au Comité d’enquêter sur l’exécution des obligations et fonctions du Service dans cette affaire, et de dresser un rapport.

Au printemps de 2011, le CSARS a entrepris une étude pour examiner la participation du SCRS dans l’affaire Abdelrazik, et ce, pour la période allant des mois précédents le départ de M. Abdelrazik pour le Soudan en mars 2003 à son retour au Canada. Le Comité s’est intéressé à l’enquête du SCRS sur M. Abdelrazik et sur ses interactions avec lui au Canada et à l’étranger, et notamment sur le rôle que le Service aurait pu jouer dans son arrestation et sa détention par les autorités soudanaises. Il a également examiné les informations que le SCRS a reçues de partenaires canadiens et étrangers, ou qu’il leur a transmises, sur M. Abdelrazik. Plus largement, le CSARS a examiné le rôle et les conseils du SCRS dans l’approche « pangouvernementale » qui a finalement été utilisée dans cette affaire.

Méthode

Le CSARS a demandé au SCRS toutes les informations pertinentes concernant M. Abdelrazik lors de la période sur laquelle portait l’étude, notamment les rapports opérationnels, la correspondance interne et les informations relatives aux échanges du SCRS avec des partenaires canadiens et étrangers. Après examen des documents, le CSARS a posé des questions pour éclaircir un certain nombre de points, et demandé à parler à certaines personnes clés directement impliquées dans l’enquête et le traitement de cette affaire.

Durant l’étude, le SCRS a informé le CSARS de préoccupations d’ordre juridiques, car l’étude du Comité a pris place en même temps que la procédure de M. Abdelrazik contre le gouvernement canadien. Par conséquent, le CSARS n’a pu avoir accès au personnel concerné qu’avec beaucoup de retard. En outre, le SCRS n’a au début répondu qu’à une partie des questions écrites du Comité et, dans un certain nombre de cas, ses réponses n’étaient pas complètes. Après des délibérations et des consultations poussées à l’interne, il a été réitéré au SCRS que les activités faisant partie du mandat du CSARS et les procédures judiciaires en cours étaient deux processus distincts et séparés, et que l’un n’entravait pas les progrès de l’autre.

Le CSARS a fini par recevoir des réponses complètes et bénéficier de la pleine coopération du Service. Le Comité a aussi finalement pu s’entretenir avec plusieurs des personnes clés impliquées dans l’affaire, même si compte tenu du laps de temps écoulé depuis les événements, certaines ne travaillaient plus pour le Service. Compte tenu des retards que le Comité a rencontrés, il a choisi de restreindre l’objectif principal de l’étude et de s’intéresser principalement à la première phase de l’affaire, soit de mars 2003 à décembre 2004, durant la période dans laquelle le SCRS a été le plus impliqué. Après cela, l’affaire Abdelrazik est devenue beaucoup plus complexe, et un certain nombre d’autres organismes canadiens ont commencé à jouer des rôles importants dans celle-ci.

En raison de la nature même de l’affaire et de la demande directe et publique de l’ancien directeur du SCRS, le Comité a décidé de soumettre son rapport directement au ministre de la Sécurité publique en vertu de l’article 54 de la Loi sur le SCRS.

Conclusions

Le CSARS a conclu que rien ne permettait de croire que le SCRS avait demandé aux autorités soudanaises d’arrêter ou de détenir M. Abdelrazik. Cependant, dans les mois qui ont précédé le départ pour l’étranger de M. Abdelrazik et son arrestation, le SCRS a tenu ses alliés du renseignement étrangers au courant de toute nouvelle information recueillie sur M. Abdelrazik.

Au cours du développement de l’affaire, le CSARS a conclu que les autorités soudanaises avaient gardé l’impression erronée que le Canada, notamment le SCRS, avait soutenu la décision initiale d’arrêter et de détenir M. Abdelrazik. Cette confusion pourrait s’expliquer par le fait que le noyau de cette affaire a été mis en avant comme une question liée aux renseignements, et il en est resté ainsi (selon les rapports) dans l’esprit des Soudanais. Pour compliquer encore plus les choses, à l’origine, les deux organisations gouvernementales les plus fortement impliquées dans l’affaire, le MAECI et le SCRS, ont mené respectivement leur travail consulaire et de renseignement en même temps, et parfois en contradiction. L’étude du CSARS a conclu que, quand le SCRS a appris que M. Abdelrazik était détenu au Soudan, le Service aurait dû se montrer plus transparent avec le MAECI au sujet de ce qu’il savait, et ce, afin d’assurer une réponse plus éclairée et coordonnée du Canada dans l’affaire.

L’étude du CSARS a soulevé un certain nombre de préoccupations. Tout d’abord, après l’incarcération initiale de M. Abdelrazik, le SCRS a été autorisé à s’entretenir avec lui au Soudan. Le Service a respecté les autorités compétentes en la matière en demandant leur approbation pour mener cet entretien. Toutefois, le CSARS a constaté que dans le cadre de son entretien et du rapport subséquent, le Service avait communiqué des informations personnelles et classifiées, et ce, de façon inappropriée et en manquement à sa politique.

Deuxièmement, au début de l’été 2004, et en préparation à la libération possible de M. Abdelrazik, le SCRS a mis au courant ses partenaires gouvernementaux des informations qu’il possédait. Cette mise à jour n’a pas été le dernier mot du Service en ce qui concerne son évaluation de la situation, et bien que cela ait pris des années avant que M. Abdelrazik quitte le Soudan (atténuant ainsi l’impact de ce que les évaluations affirmaient), le CSARS a constaté que ces évaluations étaient exagérées et transmettaient des informations inexactes.

Enfin, le CSARS avait des préoccupations à l’égard de l’enquête du SCRS, et notamment sur le fait que le Service avait produit des rapports de façon excessive, et donc avait gardé dans ses bases de données opérationnelles une quantité importante d’informations non liés à la menace, et provenant de personnes qui n'étaient pas des cibles.

Préparation du rapport du CSARS

Le CSARS a constaté qu’il était difficile de replacer les conclusions de cette étude dans le contexte. Près de dix ans se sont écoulés depuis que M. Abdelrazik a quitté le Canada pour le Soudan, et c’est un euphémisme de noter que depuis les événements de 2003 et de 2004, beaucoup de choses ont changé dans le domaine de la sécurité et du renseignement au Canada.

Tout d’abord, plusieurs commissions d’enquête canadiennes, notamment les rapports des commissions d’enquête O’Connor (2006), Iacobucci (2008) et Major (2010) ont largement fait état de tout un éventail de questions liées à la sécurité et au renseignement. Bien que n’étant pas directement liées à l’affaire Abdelrazik, les nombreuses recommandations issues de ces enquêtes visaient à améliorer les normes professionnelles attendues de la part des ministères et agences du gouvernement impliqués dans des questions de sécurité et de renseignement, et dans de nombreux cas, visaient en particulier à améliorer les politiques et les pratiques du SCRS.

Il faut également prendre en considération toute la jurisprudence élaborée au cours des dix dernières années et qui traite des rôles et des responsabilités du ou des gouvernements, des citoyens et des résidents permanents quand la question de la sécurité nationale est au cœur du débat. Le difficile cheminement de M. Abdelrazik au cœur du système judiciaire canadien a été très médiatisé, nul n’est besoin d’en refaire ici état.

De son côté, le CSARS n’a pas été un simple spectateur passif durant cette tumultueuse décennie. En fait, beaucoup des recommandations antérieures du Comité concernent des questions qui se rapportent à l’affaire Abdelrazik. Le CSARS a notamment recommandé que :

Globalement, les points ci-dessus et d’autres recommandations du CSARS ont fondamentalement changé la façon dont le SCRS exerce ses activités, notamment en matière de mise en œuvre de nouvelles directives ministérielles et politiques en matière de collecte, de conserve, d’analyse et de transmission de renseignement du Service, ainsi que dans la manière dont les relations du Service avec les organismes ministériels nationaux et étrangers devraient être gérés. Par conséquent, le programme opérationnel entier du SCRS, au Canada et surtout à l’étranger, ne ressemble en rien à celui examiné dans les années sur lesquelles porte l’étude.

Il est peut-être tout aussi important de noter que l’affaire Abdelrazik a gagné en ampleur et en complexité au fil des années. Tandis que l’enquête du SCRS se tarissait de manière significative (compte tenu de l’incapacité indéterminée apparente de M. Abdelrazik à quitter le Soudan), d’autres ministères du gouvernement du Canada, notamment le MAECI, la GRC, l’ASFC et Transports Canada (ainsi que des organismes gouvernementaux étrangers) commençaient à se batailler sur son sort. Le CSARS ne peut déterminer dans quelle mesure ces entités ont pu agir sur la base de conseils du SCRS, ou dans quelle mesure l’information du SCRS a joué dans la prise de décision. En effet, le mandat du Comité se limite au SCRS et, par conséquent, il a dû se borner à commenter les faits relatifs à l’implication du Service dans l’affaire.

Conclusions

Pour toutes ces raisons, le CSARS a choisi de ne pas émettre de recommandations en matière de politique ou de pratique dans le cadre de cette étude. En effet, la plupart des politiques du Service pertinentes ont déjà changé, et/ou les pratiques opérationnelles ont évolué au cours des dix dernières années. Toute recommandation du CSARS aurait été déjà faite par des commissions d’enquête, les décisions des tribunaux canadiens, ou par le Comité lui-même.

Le Comité estime néanmoins qu’un certain nombre de précieuses leçons peuvent être tirées de l’étude du CSARS sur le rôle du SCRS dans l’affaire Abdelrazik. Il est préoccupant que le SCRS ait élaboré des évaluations des menaces fondées sur des informations inexactes et exagérées, et que des informations classifiées aient été traitées de façon inappropriée, en dépit de la politique actuelle et l’orientation spécifique en la matière de la haute gestion. Toutes aussi inquiétantes sont les relations du SCRS avec ses partenaires du gouvernement du Canada, en particulier, dans le cas présent, le MAECI.

Comme le CSARS a souligné dans une série d’études récentes (dans lesquelles figurent certaines des recommandations pertinentes citées ci-dessus), le SCRS est en pleine expansion à l’étranger, et les partenariats du Service avec d’autres grandes organisations gouvernementales sont de plus en plus fréquents, et de plus en plus intégrés. Cependant, le SCRS devra faire face à des responsabilités et des attentes plus grandes dans ce rôle. Par exemple, en 2012, le SCRS a dit au CSARS que la législation et les protocoles existants « permettent, mais ne nécessitent pas » que le Service partage une information qui serait d’une importance cruciale pour le travail de partenaires gouvernementaux. Cette affirmation est techniquement correcte, mais une telle approche réduit ou sape toute intention de favoriser des relations de travail plus étroites et plus intégrées entre les organismes gouvernementaux. Le CSARS encourage fortement le SCRS à voir ce rapport comme une rétrospective détaillée, et une occasion de réévaluer sa posture et sa démarche visant à faire partie d’une approche pangouvernementale.

Enfin, cette étude a dû se réduire aux activités du SCRS, limite que le Comité a déjà publiquement commentée. Bien que le Comité spécial du sénat qui, en 1984, a examiné le projet de loi qui allait devenir la Loi sur le SCRS, ait entrevu « l’importance vitale du rôle que le CSARS serait appelé à jouer dans le cadre du système de renseignement de sécurité », en veillant au besoin « à ce que certaines questions touchant la sécurité fassent l’objet d’un débat adéquat », cette fonction se heurte aux limites pratiques de notre mandat.

Par conséquent, même si nous sommes confiants dans notre étude du rôle du SCRS dans l’affaire Abdelrazik, elle ne peint pas un tableau complet ou définitif du sujet. D’autres informations peuvent ressurgir de tout l’éventail de documents ou de rapports que d’autres ministères et organisations du Canada, également impliqués, ont en main, ainsi que des procédures judiciaires en cours. À l’heure actuelle, la page n’est pas encore complètement tournée sur l’affaire Abdelrazik.

Modifications apportées à la Loi sur le SCRS

En 2012, le gouvernement du Canada a modifié la Loi sur le SCRS pour que le CSARS endosse certaines des responsabilités autrefois confiées à l'inspecteur général du Service. L'une des responsabilités majeures concerne l'exigence que le CSARS remette au ministre de la Sécurité publique un certificat indiquant dans quelle mesure le rapport lui paraît acceptable. En outre, le Comité signale toute activité opérationnelle du Service visée dans le rapport qui, selon lui, n'est pas autorisée sous le régime de la Loi sur le SCRS, contrevient aux instructions données par le ministre émises en vertu de la Loi ou comporte un exercice abusif ou inutile par le Service de ses pouvoirs.


Remise du certificat au rapport annuel du directeur du SCRS au ministre de la sécurité publique : survol

Conformément aux nouvelles exigences réglementaires, le CSARS a remis un certificat au rapport annuel du directeur du SCRS au ministre de la Sécurité publique. L’énoncé de l’article 38 (2) de la Loi sur le SCRS traite de garanties importantes quant à la légalité, la nécessité et le caractère raisonnable des activités opérationnelles du Service. Par ailleurs, le rapport du directeur a dressé, ces dernières années, un aperçu utile et complet de l’ensemble des opérations du SCRS. Le rapport pour l’exercice 2011-2012 n’a pas dérogé à la règle, et a fourni un résumé des principales réalisations du Service au cours de l’année passée, ainsi que des défis opérationnels rencontrés. Par conséquent, pour le CSARS la remise du certificat aux « activités opérationnelles décrites dans le rapport » revenait à remettre un certificat à la quasi-totalité des activités du SCRS pour l’exercice 2011-2012.

À l’exception de trois points, le Comité s’est montré satisfait du rapport du directeur sur les activités opérationnelles du Service pour la période visée 2011-2012. En outre, il estime que les activités opérationnelles, telles qu’elles sont décrites dans le rapport du directeur, ne contreviennent pas à la Loi sur le SCRS ou aux directives ministérielles, et qu’elles ne comportent pas un exercice abusif ou inutile par le Service de ses pouvoirs.

Satisfaction du CSARS à l’égard du rapport

Le rapport du directeur, présenté en application de l’article 6 (4) de la Loi sur le SCRS, vise à fournir au ministre des informations pour l’aider dans l’exercice de sa responsabilité ministérielle à l’égard du SCRS. Le CSARS se montre satisfait du rapport du directeur si celui-ci remplit cette fonction, et ce, en fonction de trois critères : premièrement, si le rapport satisfait aux exigences des instructions du ministre énoncées dans les Directives ministérielles de 2008 sur les opérations et aux Directives ministérielles sur les priorités de renseignement de 2011-2012; deuxièmement, si les faits contenus dans le rapport sont exacts; et, troisièmement, si, de l’avis du CSARS, le rapport offre une représentation exacte des activités du SCRS au cours de l’exercice 2011-2012.

Le CSARS a constaté que le rapport du directeur répondait à toutes ces exigences, sauf une. Pendant le processus de remise du certificat, le CSARS a appris que, même si le point en question n’avait pas été traité dans le rapport, le Service avait fourni au ministre l’information dans le cadre d’un mémoire au Cabinet. Cette omission n’a donc pas influé sur la satisfaction globale du CSARS à l’égard du rapport du directeur.

En ce qui concerne l’exactitude du rapport du directeur, le Comité estime que les informations fournies sont, dans l’ensemble, factuelles. Le CSARS a examiné les énoncés du rapport, les a comparés aux informations détenues par le Service et, lorsque cela s’est avéré nécessaire, le Comité a présenté des demandes écrites pour obtenir des documents et des éclaircissements supplémentaires. Sur la base de cet examen, le Comité a déterminé qu’à l’exception de deux énoncés, le rapport du directeur était étayé et documenté de façon appropriée. Les erreurs relevées étaient liées à la désignation précise de l’état de la relation du Service avec une autre organisation et à l’omission d’une opération du nombre total de ces types d’opérations.

Le CSARS a examiné le rapport du directeur pour voir s’il offrait une représentation exacte des activités du SCRS au cours de la période visée 2011-2012. À cette fin, le Comité a présenté des demandes écrites de renseignements sur les activités opérationnelles du SCRS, notamment des statistiques sur les activités de base du Service, telles que les opérations de ciblage, es opérations qui font appel à des sources humaines et les demandes de mandat, ainsi que des informations sur les activités de liaison au Canada et à l’étranger, l’appui technique et opérationnel, les opérations à l’étranger et les filtrages de sécurité. Les réponses du Service ont permis au CSARS de dresser un portrait complet de l’étendue de ses activités, et le Comité a ainsi pu évaluer le rapport du directeur dans son ensemble.

Le CSARS a constaté que le rapport du directeur offrait un aperçu utile et complet de l’ensemble des opérations du SCRS. Néanmoins, le Comité a trouvé qu’il ne contenait pas de description détaillée des activités du Service conformément à l’article 16, « assistance ». Ces activités font partie intégrante des opérations du Service, et le CSARS estime qu’une description plus détaillée est justifiée.

Le Comité a également constaté que le rapport du directeur ne décrivait pas suffisamment les activités à l’étranger du Service. Il estime que des informations plus détaillées auraient fourni une description plus précise et plus représentative des opérations à l’étranger du Service, et aideraient le ministre à mieux comprendre le degré élevé de menace qui pèse sur la vie des employés travaillant dans ces milieux. Le directeur du SCRS pourrait envisager d’inclure cette information dans le rapport de l’année prochaine, et le CSARS estime que cette question est suffisamment importante pour mériter l’attention du ministre et un examen continu.

Respect de la Loi sur le SCRS, des directives ministérielles, et de l’exercice des pouvoirs du Service

Le Comité doit indiquer si le rapport du directeur lui paraît acceptable, et si, à son avis et en vertu de l’article 38 (2) de la Loi sur le SCRS, les activités opérationnelles visées dans le rapport ne sont pas autorisées sous le régime de la Loi ou des instructions données par le ministre ou comportent un exercice abusif ou inutile par le Service de ses pouvoirs.

À cette fin, le CSARS a passé en revue le contexte de l’examen, notamment les récentes modifications apportées à la Loi sur le SCRS, le pouvoir du Service de recueillir des renseignements en vertu de l’article 16, les directives ministérielles pertinentes et les priorités en matière de renseignement. Le Comité a également examiné le cadre de gouvernance interne du Service, notamment les directives internes et les politiques opérationnelles.

Le CSARS a constaté qu’à une exception près, la structure de gouvernance interne du Service respectait la Loi sur le SCRS et les directives ministérielles. Le Comité a conclu que la pratique du Service de partager de l’information avec les organisations du renseignement d’origine électromagnétique canadiennes et étrangères était potentiellement problématique en termes de conformité avec les directives ministérielles sur le partage de l’information. Ce problème n’est pas uniquement apparu au cours du processus de remise du certificat, il a été noté dans le cadre d’une étude du CSARS intitulée « Les relations et échanges du SCRS avec le Centre de la sécurité des télécommunications Canada (CSTC) » qui s’est penchée sur la question au cours de la période visée par le rapport du directeur 2011-2012. Aux fins de la certification du rapport du directeur, le CSARS ne considère pas cette question comme un cas de non-respect des directives ministérielles. Néanmoins, le CSARS estime que la situation est suffisamment préoccupante pour que le ministre en tienne compte.

À l’exception d’un domaine, le Comité estime que les activités, telles qu’elles sont décrites dans le rapport, sont conformes à la Loi et aux directives ministérielles, et constituent un exercice raisonnable et nécessaire des pouvoirs du Service. Plus précisément, le Comité a déterminé que les activités décrites dans le rapport étaient compatibles avec les obligations et fonctions énoncées dans les articles 12 à 20 de la Loi sur le SCRS et, en vertu de l’article 16, se conformaient aux demandes du ministère des Affaires étrangères et du ministère de la Défense nationale, ainsi qu’aux directives ministérielles sur les opérations, le partage de l’information et les priorités en matière de renseignement.

Section 2 : Résumés des études du CSARS et des plaintes

B. Plaintes

Outre sa fonction de surveillance, le CSARS est investi de celle d’enquêter sur les plaintes présentées par des personnes ou des groupes à l’endroit du SCRS. Les types de plaintes visées par ses enquêtes sont décrits dans la Loi sur le SCRS et peuvent prendre diverses formes, dont deux sont plus fréquentes. En vertu de l’article 41 de la Loi sur le SCRS, le CSARS enquête sur les plaintes qui concernent « des activités du Service ». Selon l’article 42, il enquête sur celles qui ont trait au refus d’habilitations de sécurité à des fonctionnaires ou à des fournisseurs du gouvernement fédéral. Beaucoup moins souvent, le CSARS fait enquête sur des renvois de la Commission canadienne des droits de la personne ou sur des rapports du ministre concernant la Loi sur la citoyenneté.

Le processus relatif aux plaintes au CSARS

La première étape d’un dossier de plainte peut être la présentation d’une demande de renseignements au CSARS, soit par écrit, en personne ou par téléphone. Sur réception d’une plainte écrite, le personnel du CSARS informe le plaignant éventuel des exigences de la Loi sur le SCRS, afin de pouvoir ouvrir un dossier de plainte officiel.

Lorsqu’il reçoit une plainte officielle par écrit, le CSARS effectue un examen préliminaire. Celui-ci peut porter sur toute information que peut détenir le SCRS, à l’exception des documents confidentiels du Cabinet. Si la plainte ne satisfait pas à certaines exigences de la loi, le CSARS la déclare hors de sa compétence et n’ouvre pas d’enquête à ce sujet.

Si le CSARS détermine qu’il a compétence, il enquête sur la plainte lors d’une audience quasi judiciaire, présidée par un ou plusieurs de ses membres que secondent son personnel et son équipe de juristes en leur fournissant des avis concernant la procédure et les questions de fond.

Des rencontres peuvent être tenues avec les parties, avant l’audience, pour établir et arrêter les questions préliminaires de procédure, comme les allégations sur lesquelles faire enquête, la forme à donner à l’audience, l’identité et le nombre des témoins à citer, les documents à préparer en vue de l’audience ainsi que la date et l’endroit de celle-ci.

Le temps nécessaire à l’enquête et au règlement d’une plainte peut varier d’après divers facteurs, dont la complexité du dossier, la quantité de documents à examiner, le nombre de jours d’audience requis (tant en présence qu’en l’absence du plaignant) et la disponibilité des participants.

Selon la Loi sur le SCRS, les audiences du CSARS doivent être tenues « en secret ». Chacune des parties a le droit d’être représentée par un avocat et de formuler des observations à l’audience, mais aucune ne peut, de plein droit, être présente au moment où une autre personne expose ses observations au CSARS, ni y avoir accès ou les commenter.

Une partie peut demander une audience ex parte (en l’absence du plaignant et, peut-être, d’autres parties) au cours de laquelle elle présente des preuves qui, pour des raisons de sécurité nationale ou pour d’autres motifs que le CSARS juge valables, ne peuvent être révélées à l’autre partie ou à son avocat. Lors d’une telle audience, l’équipe de juristes du CSARS contre-interroge les témoins pour s’assurer que les preuves ont été bien vérifiées et sont fiables. Cela permet de fournir au membre-président l’information factuelle complète et exacte en tous points au sujet de la plainte.

Une fois clos le volet ex parte de l’audience, le CSARS détermine si l’essentiel de la preuve peut être dévoilé aux parties exclues. Le cas échéant, il prépare un résumé de la preuve et le leur présente, une fois celui-ci expurgé pour des raisons de sécurité nationale.

Après avoir terminé son enquête sur une plainte portée en vertu de l’article 41, le CSARS présente un rapport au directeur du SCRS et au ministre de la Sécurité publique ainsi qu’une version déclassifiée du rapport au plaignant. Dans le cas d’une plainte déposée en vertu de l’article 42, le CSARS remet aussi son rapport à l’administrateur général compétent.

Le tableau 1 expose l’état des diverses plaintes qui ont été présentées au CSARS au cours des trois derniers exercices financiers, y compris celles qui lui ont été adressées à tort, qui étaient hors de sa compétence ou qui ont été réglées à la suite d’une enquête sans audience (p. ex. par un examen administratif).

Tableau 1 : Plaintes présentées au CSARS
  2010-11 2011-12 2012-13
Reportées de l’exercice précédent 31 16 22
Nouvelles plaintes 17 17 17
Total 48 33 39
Dossiers réglésNote de fin de tableau 32 11 14

Critères de compétence du CSARS à examiner une plainte…

…en vertu de l’article 41

En vertu de l’article 41 de la Loi sur le SCRS, le CSARS est tenu de faire enquête sur les plaintes que « toute personne » peut porter contre « des activités du Service ». Pour que le CSARS fasse enquête, deux conditions doivent être remplies :

  1. le plaignant doit d’abord avoir présenté sa plainte par écrit au directeur du SCRS sans recevoir de réponse dans un délai raisonnable (environ 30 jours) ou, s’il en a reçu une, sans que cette réponse le satisfasse;
  2. le CSARS doit être convaincu que la plainte n’est pas frivole, vexatoire ou sans objet, ni entachée de mauvaise foi.

Le CSARS ne peut enquêter sur une plainte qui peut être réglée autrement, par une procédure de griefs en vertu de la Loi sur le SCRS ou de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

…en vertu de l’article 42

Quant aux habilitations de sécurité, le CSARS est tenu, selon l’article 42 de la Loi sur le SCRS, de faire enquête sur les plaintes présentées par :

  1. les personnes qui ne sont pas embauchées par le gouvernement fédéral à cause du refus d’une habilitation de sécurité;
  2. les fonctionnaires fédéraux qui sont renvoyés, rétrogradés ou mutés ou qui se voient refuser une mutation ou une promotion pour la même raison;
  3. les personnes qui se voient refuser un contrat pour la fourniture de biens ou de services au gouvernement, toujours pour le même motif.

Les plaintes semblables doivent être présentées dans les 30 jours du refus de l’habilitation de sécurité.

Le CSARS peut prolonger cette période si des raisons valables lui sont fournies.


Enquête du CSARS : Allégations de harcèlement, de profilage racial et de partage de données trompeuses

Le CSARS a enquêté sur une plainte en vertu de l’article 41 de la Loi sur le SCRS, dans laquelle le plaignant a allégué qu’un employé du SCRS, lors d’une entrevue avec lui, s’était comporté d’une manière qui constituait du harcèlement, qu’il avait utilisé des stratégies d’entrevue inappropriées, avait proféré des menaces, et avait menti au sujet de l’impact de l’entrevue sur l’habilitation de sécurité du plaignant. Il a également allégué que le SCRS faisait du profilage racial et que d’autres employés du Service avaient porté atteinte à sa liberté de religion au cours d’entretiens dans le cadre du processus d’évaluation en vue d’une habilitation de sécurité du gouvernement. Enfin, le plaignant a allégué que l’enquête du SCRS relative à l’évaluation de son habilitation de sécurité avait été insuffisante, avait conduit au partage de données trompeuses sur lui avec un ministère du gouvernement, et que le processus avait subi des retards abusifs.

Le CSARS a conclu que la conduite du premier employé du Service ne constituait pas du harcèlement et qu’il n’avait pas employé de stratégies inappropriées, mais que son choix de sujets et le ton de la discussion avaient créé des tensions inutiles lors de l’entrevue. Il a aussi constaté que la conduite de l’employé avait été trompeuse, car celui-ci a profité du processus d’habilitation de sécurité pour soutirer des informations au plaignant. Le CSARS a recommandé au SCRS d’aborder la question au niveau opérationnel et politique afin de réduire le risque qu’un tel scénario se reproduise.

Le CSARS a constaté qu’il n’y avait aucune preuve de profilage racial dans ce cas, et que le Service était dans son plein droit de conduire une telle enquête de sécurité sur le plaignant, et ce, sur la base de l’information dont il disposait pour s’acquitter de son mandat. Néanmoins, le CSARS a également constaté qu’il n’est pas déraisonnable, pour les personnes comme le plaignant qui n’ont pas accès à des informations classifiées, de se sentir ciblées. À cet égard, le CSARS recommande au SCRS de communiquer avec les communautés minoritaires pour aborder la question de la collecte des données concernant l’origine ethnique, et ce, comme un moyen possible de rassurer le public sur le fait que le SCRS ne fait pas de profilage racial.

Le CSARS a constaté qu’il n’y avait pas eu d’atteinte à la liberté de religion dans le contexte du processus d’évaluation de l’habilitation de sécurité du gouvernement, et que l’enquête du SCRS se justifiait dans le cadre de la politique de filtrage de sécurité en vigueur. Le CSARS a conclu que l’allégation de retard injustifié était sans fondement.

Le CSARS n’a pas trouvé que le SCRS avait communiqué des informations trompeuses au sujet du plaignant. Cependant, le Comité a constaté que les informations fournies à l’autre ministère du gouvernement étaient incomplètes, car certaines des conclusions de l’évaluation avaient été exclues. Le CSARS recommande que le SCRS remédie à la situation en envoyant les informations précédemment exclues au ministère concerné.

Enfin, le plaignant a également allégué qu’il existait dans l’autre ministère concerné de nombreux exemples de profilage dans des documents internes le concernant, et ce, après que le Service ait partagé de l’information, et que ce même ministère n’avait pas officiellement refusé sa demande d’habilitation de sécurité, l’empêchant ainsi de trouver un recours en vertu de l’article 42 de la Loi sur le SCRS. En raison des limites du mandat du CSARS dans cette enquête en vertu de l’article 41 de la Loi sur le SCRS, le Comité n’a pas été en mesure de tirer des conclusions sur cette question.


Enquête du CSARS : Allégations de refus des droits fondamentaux et de connaissances culturelles insuffisantes de la part du SCRS

Le CSARS a enquêté sur une plainte en vertu de l’article 41 de la Loi sur le SCRS relative à la conduite d’un employé du SCRS lors d’une entrevue de pré-sélection dans le cadre d’une demande de résidence permanente. Le plaignant a allégué que l’employé du SCRS lui avait refusé certains droits fondamentaux, s’était comporté de façon inappropriée, et n’avait pas une connaissance suffisante de son pays d’origine et du contexte culturel de celui-ci.

Le CSARS a constaté que, bien que les droits du plaignant n’aient pas été violés, l’employé du SCRS aurait dû faire preuve de souplesse pour tenir compte de certaines demandes du plaignant lors de l’entrevue. De même, le CSARS n’a trouvé aucune preuve de conduite répréhensible de la part de l’employé, mais il a noté que, dans un cas, il aurait pu être plus sensible aux craintes du plaignant. Le CSARS a rappelé au Service que ses employés devaient faire preuve d’ouverture lors d’entretiens avec des personnes qui viennent de pays où les services de renseignement sont craints, et devaient éviter toute action qui pourrait être interprétée comme étant abusive ou manipulatrice.

Le Comité a aussi constaté que l’employé du SCRS avait été bien préparé avant l’entrevue, et qu’il avait une connaissance suffisante de la culture et du pays du plaignant.

Enfin, le CSARS recommande qu’afin d’éviter de reporter les entrevues d’immigration et de causer des retards supplémentaires excessifs, le SCRS émette une directive opérationnelle à tous les bureaux régionaux, conformément avec l’orientation prise par la région de Toronto, selon laquelle les enquêteurs sont tenus d’amener des appareils d’enregistrement à toutes les entrevues d’immigration et de veiller à ce qu’ils soient en état de marche.


Enquête du CSARS : Allégations de retard à fournir une évaluation de sécurité

Le CSARS a enquêté sur une plainte en vertu de l’article 41 de la Loi sur le SCRS à l’égard d’une allégation de retard du SCRS à fournir une évaluation de sécurité en vue d’une habilitation d’accès au site du plaignant. Le plaignant a fait valoir que le retard lui avait fait perdre des possibilités d’emploi.

Le Comité a constaté que le processus suivi par le Service, ainsi que les décisions et mesures prises dans le cadre de l’évaluation, avaient été raisonnables. L’agent chargé du dossier et l’enquêteur ont fait une enquête minutieuse pour s’assurer que l’évaluation était juste.

Toutefois, le Comité a constaté qu’il y avait des retards et des périodes d’inactivité dans le dossier qui, cumulés, ont rendu le délai global déraisonnable. Le CSARS a réitéré l’une de ses recommandations pour qu’un système de suivi soit mis en place, et ce, afin d’identifier les dossiers qui dépassent le temps moyen de traitement pour que priorité leur soit donnée. De plus, le CSARS recommande que des systèmes de gestion du temps et des rappels soient mis en œuvre pour éviter de telles situations.


Enquête du CSARS : Révocation d’habilitations de sécurité

Le CSARS a examiné séparément deux plaintes connexes en vertu de l’article 42 de la Loi sur le SCRS émises par des fonctionnaires dont les habilitations de sécurité avaient été révoquées sur la base de leur association avec une entité tierce.

Le Comité a constaté qu’il existait des motifs raisonnables de douter de la fiabilité des plaignants, et ce, en raison de relations avec des personnes ou des groupes soulevant des préoccupations. À cet égard, les plaignants pourraient agir ou être incités à agir de façon à constituer une menace envers la sécurité du Canada. Pour ces raisons, le CSARS recommande que la décision de révoquer les habilitations de sécurité des plaignants soit maintenue.

À la suite de ces enquêtes, le CSARS recommande également la révision de certaines lignes directrices de politiques pour les employés sur la question de ce qu’ils peuvent divulguer à des tiers en ce qui concerne l’identité de leur employeur, et a conseillé une politique plus cohérente définissant les situations où une telle divulgation est appropriée.

Section 3 : Survol du CSARS

Composition du comité

Le CSARS est présidé par l’honorable Chuck Strahl, C.P. Les autres membres du Comité sont l’honorable Frances Lankin, C.P., C.M., l’honorable Denis Losier, C.P., C.M., l’honorable Deborah Grey, C.P., C.M., et l’honorable L. Yves Fortier, C.P., C.M., O.Q., c.r.

Personnel et organisation

Le CSARS jouit du soutien d’un directeur exécutif, Michael Doucet, et d’un effectif autorisé de 17 employés, en poste à Ottawa. Cet effectif comprend un directeur de la recherche, un avocat principal, un directeur des services généraux et d’autres professionnels et agents administratifs.

Le Comité dicte au personnel l’orientation à donner aux travaux de recherche et autres activités désignées prioritaires pour l’année. La marche des affaires courantes est confiée au directeur exécutif qui s’enquiert au besoin de la ligne de conduite à tenir auprès du président, en sa qualité de premier dirigeant du CSARS.

Dans le cadre de leurs travaux suivis, le président et les membres ainsi que les cadres supérieurs du Comité prennent part régulièrement à des discussions avec la direction et le personnel du SCRS et d’autres membres de la collectivité du renseignement. À ces échanges se greffent des entretiens avec des universitaires et des experts du renseignement et de la sécurité et d’autres organismes compétents. Ces activités enrichissent les connaissances du CSARS au sujet des questions et débats qui entourent le paysage de la sécurité nationale au Canada.

Les membres et les cadres du Comité visitent aussi les bureaux régionaux du SCRS afin de comprendre et d’évaluer le travail courant des enquêteurs locaux. Ces visites leur fournissent l’occasion de se faire exposer les problèmes, difficultés et priorités propres à ces bureaux par les cadres régionaux du Service. Elles leur permettent aussi de faire valoir ce qui polarise les efforts et les préoccupations du CSARS.

Au chapitre des ressources humaines, le CSARS continue de gérer ses activités dans les limites des ressources qui lui sont octroyées. Ses principales dépenses ont trait au traitement de son personnel et à ses déplacements afin de participer aux audiences, aux exposés et aux activités de surveillance du Comité au Canada.

Le tableau 2 présente une ventilation des dépenses réelles et des prévisions de dépenses.

Tableau 2 : Dépenses du CSARS 2012-2013 (en milliers de dollars)
  2012-2013 (total des autorisations) 2012-2013 (réelles)
Total 3 081 2 901
Personnel 2 349 2 050
Biens et services 732 852

Activités du comité

27-30 mai 2012 : Le CSARS a tenu la conférence internationale des organismes de surveillance du renseignement, de concert avec le Bureau du Commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications. Cette conférence, qui avait pour thème « consolider la démocratie par une surveillance efficace », a réuni à l’hôtel Château Laurier d’Ottawa des délégués de l’Australie, de la Belgique, de l’Allemagne, des Pays-Bas, de la Norvège, de l’Afrique du Sud, du Royaume-Uni et des États-Unis. Elle présentait des groupes d’experts sur l’évolution du droit dans divers domaines : la surveillance et le contrôle, les médias comme moyen de surveillance/contrôle, la mobilisation de l’opinion publique et l’équilibre entre la sécurité nationale et les droits individuels. Parmi les conférenciers invités, on comptait le sénateur Hugh Segal, Mel Cappe (ancien greffier du Conseil privé), Jim Judd (ancien directeur du SCRS), David Walmsley (rédacteur en chef du Globe and Mail) et le juge Simon Noël, de la Cour fédérale.

23-27 juillet 2012 : La directrice exécutive, accompagnée de représentants du SCRS, du ministère de la Justice ainsi que d’Affaires étrangères et Commerce international Canada, a participé à un exercice de renforcement de capacité à Trinité-et-Tobago.

11 octobre 2012 : La directrice exécutive du CSARS a rencontré une délégation du gouvernement français à Ottawa, notamment le coordonnateur national du renseignement.

19-20 novembre 2012 : Le président du CSARS et les membres du Comité se sont déplacés dans les bureaux régionaux du SCRS en Colombie-Britannique et dans les Prairies.

22 janvier 2013 : Le directeur exécutif a rencontré, lors d’une réunion de suivi, les membres de la délégation française parlementaire dédiée au contrôle de la communauté du renseignement à Ottawa.

6-8 février 2013 : Le directeur exécutif a participé à la 14e conférence annuelle sur la confidentialité et la sécurité à Victoria, en Colombie-Britannique.

27-28 mars 2013 : Le directeur exécutif a assisté à la conférence sur l’Échange de la gouvernance publique à l’Institut sur la gouvernance publique à Ottawa.

Liste des recommandations du CSARS

Au cours de la période étudiée, l’exercice 2012-2013, le CSARS a formulé les recommandations qui suivent découlant des études effectuées et des plaintes visées par ses enquêtes.

Au cours de la période étudiée, l’exercice 2012-2013, le CSARS a formulé les recommandations qui suivent découlant des études effectuées et des plaintes visées par ses enquêtes.
Rapport Recommandations du CSARS

Les relations et échanges du SCRS avec le CSTC

Le CSARS recommande que le SCRS élabore des principes généraux de coopération avec le CSTC plus clairs et plus solides. Ces principes devraient répondre au nombre croissant de défis qui ont surgi entre les deux organisations, tout en respectant leurs mandats respectifs.

Examen du nouveau pouvoir octroyé au moyen de mandat en vertu de l’article 21

Le CSARS recommande que, dans le cadre de ce nouveau pouvoir octroyé au moyen de mandat, le SCRS étende l’usage de mises en garde et de garanties aux organismes de toute la communauté du Groupe des cinq.

Le travail d’enquête liée à l’espionnage et à l’influence étrangère

Le CSARS recommande que le SCRS réajuste de façon appropriée ses politiques et pratiques, et ce, pour aider les enquêteurs et analystes à identifier des seuils communs et cohérents, et pour évaluer quand une activité passe dans le domaine clandestin.

Le CSARS recommande que le SCRS élabore une stratégie visant à offrir les mêmes messages d’avertissement sur les activités influencées par l’étranger à tous les secteurs potentiellement touchés par de telles activités.

Les initiatives du SCRS en matière de collecte à l’étranger

Le CSARS soutient le développement de la formation opérationnelle, et recommande que le Service veille à ce que toutes les personnes jugées prioritaires pour la formation en bénéficient, surtout si elles travaillent dans un milieu dangereux.

Le CSARS recommande que le SCRS élabore un cadre juridique décrivant les activités acceptables et interdites, notamment les niveaux d’approbation correspondants au sein même du Service et en dehors de celui-ci.

L’évolution de la marque du SCRS à l’étranger

Le CSARS recommande que le SCRS prenne des mesures immédiates pour s’assurer que les profils en vertu de l’article 17 sont toujours exacts, complets, à jour et pertinents.

L’appui du SCRS au périmètre de sécurité du Nord du Canada

Le CSARS recommande que le SCRS « institutionnalise les responsabilités » en matière d’initiatives dans le Nord, et ce, en demandant au siège du Service d’établir des objectifs de liaison et opérationnels sur plusieurs années. Le Service doit aussi s’assurer que des ressources sont engagées à l’appui de tels objectifs.

Le recours du SCRS aux méthodes clandestines

Le CSARS recommande que la politique du SCRS soit modifiée pour s’assurer que toutes les parties sont informées des leçons apprises à la suite d’une infraction de la sécurité suspectée ou confirmée concernant l’usage de cette méthode secrète.

Le Comité recommande également que le SCRS mette immédiatement à jour sa politique sur ce nouveau programme afin qu’elle soit plus en phase avec les autres politiques opérationnelles.

Allégations de harcèlement, de profilage racial et de partage de données trompeuses

Le CSARS recommande au SCRS de communiquer avec les communautés minoritaires pour aborder la question de la collecte des données concernant l’origine ethnique, et ce, comme un moyen possible de rassurer le public sur le fait que le SCRS ne fait pas de profilage racial.

Le CSARS recommande que le SCRS remédie à la situation en envoyant les informations précédemment exclues au ministère concerné.

Allégations de refus des droits fondamentaux et de connaissances culturelles insuffisantes de la part du SCRS

Le CSARS recommande qu’afin d’éviter de reporter les entrevues d’immigration et de causer des retards supplémentaires excessifs, le SCRS émette une directive opérationnelle à tous les bureaux régionaux, conformément avec l’orientation prise par la région de Toronto, selon laquelle les enquêteurs sont tenus d’amener des appareils d’enregistrement à toutes les entrevues d’immigration et de veiller à ce qu’ils soient en état de marche.

Allégations de retard à fournir une évaluation de sécurité

Le CSARS recommande que des systèmes de gestion du temps et des rappels soient mis en œuvre pour éviter de telles situations.

Révocation d’habilitations de sécurité

Le CSARS recommande que la décision de révoquer les habilitations de sécurité des plaignants soit maintenue.

Le CSARS recommande la révision de certaines lignes directrices de politiques pour les employés sur la question de ce qu’ils peuvent divulguer à des tiers en ce qui concerne l’identité de leur employeur, et a conseillé une politique plus cohérente définissant les situations où une telle divulgation est appropriée.

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